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Analyser les objets à l’air au moyen de particules accélérées sous vide

Les ions utilisés pour l’analyse des objets de musée dans AGLAE (principalement des protons) sont accélérés sous vide. Pour des raisons de taille et de fragilité, il est généralement exclu de soumettre les œuvres d’art au vide et donc préférable de les analyser à l’air. Il faut donc faire passer ce faisceau de particules du vide à l’air sans dénaturer leur énergie et leur direction. Tel était le défi auquel devaient faire face physiciens et ingénieurs.

Schéma de principe du faisceau extrait à l’air
Le faisceau de particules sortant de l’accélérateur circule dans le vide. Pour atteindre l’objet à analyser situé dans l’air, il doit traverser une fenêtre. Pour ne pas dénaturer la qualité du faisceau cette fenêtre doit être aussi mince que possible – un dixième de micron pour AGLAE – et donc de très petite surface. Le faisceau a été focalisé, son diamètre réduit à quelques microns pour réaliser des analyses très ponctuelles. Pour réduire la diffusion des particules lors de leur court trajet de la fenêtre à la cible on insuffle un jet d‘hélium, un gaz très léger. Autour de la fenêtre sont disposés des détecteurs qui recueillent les particules émises lors de l’impact du faisceau.
© IN2P3

Un développement technique majeur opéré sur AGLAE a été l’obtention de faisceaux extraits à l’air, qui permettent l’analyse directe sans contact et sans prélèvements (donc totalement non invasive) d’objets d’art ou d’archéologie de toute taille ou forme. Ce progrès décisif est obtenu à l’aide d’un faisceau extrait à l’air à travers une fenêtre de sortie ultra-mince. Cette fenêtre est suffisamment résistante pour supporter la pression atmosphérique et les dommages créés par le faisceau, mais assez mince pour ne pas dégrader le faisceau incident.

L’œuvre est alors librement placée à quelques millimètres en aval de cette fenêtre.

Sortie du faisceau
On aperçoit au centre, la fenêtre de sortie du faisceau d’AGLAE entourée de dispositifs de contrôle et de détecteurs de rayons X (pour les méthodes PIXE notamment) et de particules rétrodiffusées (pour la méthode RBS).
© C2RMF

L’adjonction à la ligne de faisceau extrait d’un dispositif de focalisation magnétique a permis un autre progrès décisif. On a pu ainsi obtenir un micro-faisceau extrait permettant l’analyse directe d’objets de musée à pression atmosphérique avec une résolution précision (résolution) spatiale considérablement accrue. En utilisant une fenêtre de sortie en nitrure de silicium (Si3N4) de 0,1 micron d’épaisseur, on parvient à un diamètre de faisceau d’environ 20-30 microns en plaçant l’objet à 3 millimètres de la fenêtre sous une atmosphère d’hélium. Une telle taille de faisceau rend désormais possible l’analyse de petits détails tels que des inclusions dans les gemmes ou des enluminures.

Dispositifs entourant la fenêtre de sortie
On aperçoit au centre la fenêtre de sortie du faisceau d’AGLAE entourée de dispositifs de contrôle et de détecteurs : 4 détecteurs de rayons X de haute énergie ; 1 détecteur de rayons X de basse énergie ; 1 détecteur annulaire de particules rétrodiffusées entourant la fenêtre de sortie ; un détecteur servant à mesurer la dose, c’est-à-dire l’intensité du faisceau.
© C2RMF

Une amélioration récente a consisté à diminuer considérablement l’intensité du faisceau afin de réduire le risque de dommage subi par les objets les plus fragiles (peintures, manuscrits). Ceci a été réalisé en augmentant la sensibilité du dispositif de détection des rayons X émis par la cible grâce à l’emploi de plusieurs détecteurs : 4 pour les rayons X de haute énergie plus 1 pour ceux de basse énergie.

Les multiples détecteurs placés à immédiate proximité du point de sortie, permettent ainsi un recours simultané aux diverses méthodes d’analyse, notamment PIXE et RBS. Les rayons X de haute énergie plus rares que ceux de basse énergie requièrent davantage de détecteurs. Les particules rétrodiffusées (RBS) sont détectées par un détecteur annulaire entourant la sortie.