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Une analyse ultra-sensible de surfaces

La technique d’analyse la plus employée auprès de l’accélérateur AGLAE est basée sur la détection de rayons X. La méthode PIXE utilise l’émission X provoquée par des particules chargées accélérées qui interagissent avec les atomes des matériaux traversés de la même façon que les rayonnements radioactifs. Quand la particule arrache à un atome-cible, un de ses électrons les plus internes, l’atome réagit en émettant un rayon X dont l’énergie est caractéristique.

Ces rayons X sont capables de sortir du matériau analysé. Ils sont produits en grand nombre, sont détectés et leur énergie est mesurée. Du spectre en énergie de ces photons X, on déduit la composition élémentaire de l’échantillon.

Analyse d’un caractère d’un manuscrit copte
La répartition en énergie des rayons X émis par un caractère analysé du manuscrit copte présenté ci-dessous, montre la présence de traces de fer. Ces traces de fer sont caractéristiques de la nature « métallo-gallique » de l’encre utilisée. La noix de Galle (parasite du chêne) macérée dans du vitriol, servait à fabriquer des encres noires.
© LRMF

La méthode s’apparente par son principe à la fluorescence X utilisée notamment dans l’industrie. Mais alors que les rayonnements utilisés en fluorescence X (rayons gamma ou X) pénètrent profondément dans le matériau, avec la méthode PIXE c’est la surface de l’échantillon qui est analysée, les ions provenant de l’accélérateur étant arrêtés au bout de quelques microns.

Manuscrit copte
La surface de l’objet examiné touchée par les particules délivrées par l’accélérateur AGLAE est extrêmement petite : une fraction de millimètre carré. L’extrême précision du faisceau de particules permet de le pointer sur chacun des caractères de ce manuscrit copte du XIII ème siècle et d’analyser par la méthode PIXE la nature des encres employées.
© LRMF

Les avantages de la technique PIXE sont nombreux. Elle détecte tous les éléments plus lourds que le sodium. Elle est rapide : une irradiation d’une minute peut suffire. Elle est sensible : on mesure des teneurs de quelques parties par million. Elle ne détériore pas l’échantillon, ce qui est appréciable pour les objets précieux (bijoux, tableaux, papiers…).

Enfin, cette technique est ponctuelle : le faisceau de projectiles, dont on peut choisir le diamètre entre quelques millimètres et un micron, permet d’étudier des détails, tels qu’une soudure dans un bijou ou dans une incrustation.

Les particules accélérées pénètrent peu dans la cible et ne sondent que la surface. Ainsi des protons de deux millions d’électronvolts (MeV) permettent d’analyser une épaisseur de 10 micromètres d’argent. Dans une poterie, le parcours des protons ne dépasse pas quelques dizaines de microns.

La technique possède en effet une caractéristique essentielle pour ce champ d’investigation, celle d’être non destructive. Un progrès décisif a consisté à développer un dispositif expérimental permettant l’analyse directe des objets sans prélèvement. Ceci est réalisé à l’aide d’un faisceau extrait à l’air à travers une fenêtre de sortie ultra-mince, jusqu’à 0,1 µm d’épaisseur.

Les applications des techniques d’analyse par faisceaux d’ions (Ion Beam Analysis en anglais) à l’art et l’archéologie remontent pratiquement aux débuts du développement de la méthode PIXE (Particle Induced X-ray Emission), avec l’étude de tessons de céramiques et d’outils en obsidienne. Elles ont ensuite été rapidement étendues à tous les matériaux du patrimoine culturel.

Deux autres principales techniques d’analyse sont aussi employées, parfois en association avec la méthode PIXE : l’émission de gamma induits par des réactions nucléaires (méthode PIGE) : la « rétrodiffusion Rutherford » (RBS) qui identifie la nature des noyaux présents à partir de la façon dont les particules rebondissent sur les noyaux.