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Une mise en œuvre du principe de précaution

Une règle simple et pratique
Dans un diagramme doses-effets, la relation de proportionnalité – dite « relation linéaire sans seuil », apparaît comme une ligne droite passant par l’origine. La relation s’applique pour une dose unique comme pour des doses cumulées : l’effet d’une dose ne dépend pas des expositions antérieures . On peut considérer les doses comme indépendantes ; le risque n’est jamais nul. Cette ligne droite, commode pour réglementer la radioprotection, n’est qu’une approximation.
© IN2P3

Comment prévoir les effets d’une dose radioactive ? L’UNSCEAR et le CIPR, les organismes de radioprotection habilités à donner des directives ou des recommandations au niveau international proposent une règle simple. Dans le jargon des experts, cette règle, prise comme référence, est appelée la « relation linéaire sans seuil.

Cette relation importante est une application du principe de précaution. Il s’agit d’estimer les risques maximum découlant d’une exposition à la radioactivité. La relation fait l’hypothèse que les risques sont proportionnels aux doses reçues. Une “proportionnalité” est mathématiquement représentée par une ligne droite (une relation linéaire) passant par l’origine. Le taux de proportionnalité retenu par le CIPR est de 5% par sievert dans le cas des cancers mortels résultants d’une exposition.

La vertu d’une « relation linéaire » est sa simplicité. Si la relation est linéaire, les doses et les risques s’ajoutent d’une manière indépendante. Par exemple, l’effet pour un malade de passer un scanner ne dépendra pas des expositions subies antérieurement.

Une conséquence de la proportionnalité veut que le risque demeure même si la dose est très faible. Cette existence d’un risque dès le premier millionième de sievert est la source de désaccords. De nombreux radiologistes pensent qu’en dessous d’une certaine exposition, appelée seuil, le risque serait nul. Tel est par exemple en France, le point de vue de l’Académie de Médecine. Il n’est pas partagé par tous.

Une panoplie de modèles
Les données dont on dispose actuellement, provenant surtout d’études faites sur les survivants d’Hiroshima et Nagasaki, sont affectées d’erreurs très importantes. La figure de gauche montre comment, pour des doses allant de 0 à 3 sieverts, on détermine la pente de la relation linéaire sans seuil. Les marges d’erreurs ne permettent pas départager cette droite de 2 autres modèles : une ligne parallèle avec effet de seuil et une courbe intermédiaire. En particulier (à droite) pour des doses inférieures à 500 mSv, on ne peut les départages bien que les risques prédits par les trois modèles différent sensiblement.
© IN2P3 (Source IRSN/H.Métivier).

Une analogie permet de comprendre le rôle d’un « seuil ». Remplaçons l’ingestion d’une petite quantité de radioactivité, par la chute d’objets légers sur nos têtes. Si l’objet est très léger, par exemple une plume, la chute d’un grand nombre de ces objets ne tuera personne. Mais si ces objets sont regroupés dans des « sacs » plus lourds, moins de personnes seront touchées mais les conséquences pourront devenir graves. Dans cette analogie, le seuil est le poids à partir duquel recevoir un tel sac peut causer un décès.

Un expert en radioprotection a proposé cette autre image : “Avaler 100 cachets de paracétamol d’un coup serait certainement mortel. Selon l’hypothèse de la relation linéaire sans seuil, le facteur de risque associé à chaque comprimé serait alors d’un centième. Cela signifie-t-il que parmi 100 personnes avalant un cachet, l’un deux doit mourir ? C’est improbable, ce qui suggère que la relation dans ce cas n’est pas linéaire. Ce pourrait être aussi le cas de la relation entre l’effet et l’exposition dans le domaine des faibles expositions aux rayonnements.”

La relation linéaire est basée sur des observations faites avec des doses relativement importantes. Faute de données sur lesquelles s’appuyer, on est réduit à spéculer sur ce qui se passe dans le domaine des faibles doses (en dessous de 100-200 mSv) en supposant une ligne droite, quitte à y surestimer les risques s’il existe par exemple un seuil.

Enfin, un défaut de la relation est de négliger les variations de la sensibilité aux radiations qui peuvent être importantes d’une personne à l’autre.

Malgré ses limites, la relation a un rôle réglementaire utile parce qu’elle permet d’encadrer la radioprotection de manière simple et efficace.