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Le cas des fortes expositions

Effets précoces
Les effets précoces se manifestent au dessus d’une certaine dose de radiations, appelée seuil. Ces effets précoces sont dits ” déterministes ” car ils sont les mêmes pour une dose donnée (le hasard n’intervient pas). Au niveau du corps entier (dose efficace), on estime à 500 mSv le seuil d’apparition de ces effets. Au niveau local, par exemple des testicules, une dose équivalente de 2 Sv entraîne une stérilité transitoire et une dose de 6 Sv une stérilité définitive. Pour la peau, une dose locale de 3 à 8 Sv entraîne une rougeur passagère, de 7 à 10 Sv une cloque et au dessus de 10 Sv une nécrose.
© IN2P3/NEPAL (Source Jean Colin)

Pour les fortes doses, supérieures à certain seuil, les dommages apparaissent d’une manière reproductible et produisent des destructions massives de cellules. Ils sont appelés déterministes par opposition aux effets probabilistes. On peut prévoir alors avec une relative certitude l’effet d’une exposition. Les dommages sont importants. Leur gravité augmente avec la dose.

Les  effets déterministes sont directement liés à la mort cellulaire. Ils apparaissent de façon certaine au dessus d’un seuil de dose toujours supérieur à 500 mGy (milligrays), mais qui peut aller jusqu’à plusieurs Grays. Leur gravité est en proportion de la dose. Les effets se manifestent au bout de quelques jours ou semaines, d’une manière non immédiate mais rapide comparée aux délais de plusieurs années caractéristiques des effets dits « probabilistes » qui résultent des doses moyennes et faibles.

En raison de leur reproductibilité, les effets des fortes doses sont utilisés en radiothérapies pour détruire des cellules cancéreuses, en concentrant la dose sur la tumeur à traiter. Les effets des rayonnements dépendent de la dose reçue.

La dose significative est la quantité d’énergie déposée dans le tissu par les rayonnements radioactifs, c’est-à-dire le gray (Joule/kg). En radiothérapies et curiethérapies, les doses sont des doses locales, très élevées, pouvant atteindre plusieurs dizaines de grays, l’objectif étant d’éliminer les cellules malignes.

Dans le cas d’un accident, l’exposition touche l’ensemble du corps. La dose à considérer est la dose efficace qui est corps entier. Après un accident, les effets déterministes se manifestent pour des doses de l’ordre du gray ou de la fraction de gray. Au-dessus de 1 gray, une hospitalisation est nécessaire. La mort devient souvent certaine à partir de 5 grays.

Ce sont les bombes atomiques d’Hiroshima et de Nagasaki qui ont été à l’origine du plus grand nombre de personnes ayant payé de leur vie l’exposition à de très fortes doses. Toutefois les radiations n’ont pas été la principale cause des décès. De nombreuses victimes sont mortes immédiatement ou peu après l’explosion du fait de l’effet de souffle et des incendies ou encore de graves brûlures qui ne leur ont pas laissé le temps de subir l’effet des radiations.

Exemple d’effets déterministes : l’affaire Litvinenko
L’empoisonnement au Polonium-210 de l’ancien agent du KGB Alexandre Litvinenko est un exemple des effets déterministes des très fortes doses. Les symptômes en sont clairs et reproductibles. Litvinenko mourut le 23 novembre 2006, environ 3 semaines après avoir bu dans un grand hôtel de Londres un thé dans lequel avait été introduit une dose plusieurs fois mortelle de cet radioélément 12 milliards de fois plus radioactif à nombre d’atomes égal que l’uranium.
© DR

Si l’on met à part Hiroshima et Nagasaki, les victimes des très fortes doses de radiations sont rares. Le cas le plus connu est celui de pompiers de Tchernobyl qui participèrent aux opérations de déblaiement dans la centrale endommagée immédiatement après l’accident. Une quarantaine de ces pompiers moururent dans les mois et semaines qui suivirent. A Tokaimura, deux des trois techniciens japonais dont les erreurs de manipulation provoquèrent un accident de criticité en 1999, moururent aussi dans les semaines qui suivirent.

L’empoisonnement radioactif en novembre 2006 de l’ancien agent du KGB Alexandre Litvinenko est un autre exemple. Dans cette affaire qui défraya la chronique, Litvinenko fut empoisonné pour avoir bu du thé qui contenait une dose certes infinitésimale mais plusieurs fois mortelle de polonium-210. Cet élément est extrêmement radioactif et très rare à l’état naturel  (On pense que le polonium provenait d’un réacteur russe). Les médecins mirent du temps à comprendre ce dont souffrait Litvinenko ; un tel empoisonnement étant difficilement imaginable. Comme les grands irradiés de Tchernobyl et Tokaimura, le décès de Litvinenko survint après plusieurs semaines.