Les rayons uraniques
Le premier indice d’un phénomène inconnu
Le 28 décembre 1895, Wilhelm Conrad Röntgen (ou Rœntgen) annonce la découverte des rayons X. Dès la mi-janvier, dans tous les pays occidentaux, des médecins et des physiciens utilisent l’appareillage décrit par Rœntgen pour prendre des radiographies. À Paris, le physicien Oudin et le médecin B.Barthélemy font le premier examen radiologique français, qu’Henri Poincaré présentera à l’Académie des Sciences le 20 janvier. Lors de cette séance, Poincaré suggère à Henri Becquerel d’explorer les relations entre phosphorescence et émission de rayons X.
Savant, curieux d’esprit, Henri Becquerel travaillait alors dans un laboratoire au Muséum d’histoire naturelle et s’intéressait à une grande variété de problèmes liés à la phosphorescence et à la fluorescence.
Henri Becquerel, décide de voir si l’émission des rayons X est liée à la phosphorescence. En mars 1896, le ciel est voilé, il ne peut exposer au soleil un sel phosphorescent d’uranium et range celui-ci dans un tiroir, avec une plaque photographique vierge enveloppée dans du papier noir. Quelques jours plus tard, il découvre que ce sel a émis spontanément un rayonnement pénétrant capable d’impressionner la plaque photographique.
Il est interpellé par le fait qu’une des plaques photographiques montrait l’image d’une croix de Malte. Cet objet s’était trouvé interposé entre la plaque photographique enveloppée de papier et une mince lame de verre supportant des sels d’uranium. Ces sels avaient donc émis des rayonnements pénètrants qui avaient été absorbés par la croix.
Les premiers rayons radioactifs qui furent détectés …
Henri Becquerel établit dès 1896 que plusieurs sels d’uranium, phosphorescents ou non, avaient la même propriété et donc que ce rayonnement étaient émis par l’uranium.
Il appelle les rayons émis : les rayons uraniques. Il constate qu’ils sont capables d’électriser l’air. L’intensité ne décroissant pas avec le temps, Henri Becquerel se demande « d’où l’uranium emprunte l’énergie qu’il émet avec une telle persistance ? »
1896 : L’expérience d’Henri Becquerel. Comment Henri Becquerel qui étudiait la fluorescence en vint à conclure que l’uranium émettait des rayons qui lui étaient propres. Vidéo du CEA (2014).
On sait aujourd’hui que les « rayons uraniques » qui impressionnèrent la plaque de Becquerel ne sont pas les particules alpha de l’uranium – arrêtés par l’enveloppe de papier – mais des rayons bêta et gamma de la proche descendance.
Henri Becquerel avait utilisé un flacon contenant des sels d’urane, produit rare mais dont disposait le Muséum national d’histoire naturelle. Compte tenu des périodes radioactives de l’uranium-238 et de ses descendants, le flacon devait contenir les premiers éléments de la filiation, c’est-à-dire le thorium-234, le protactinium-234 et l’uranium-234.
L’uranium-238 (principal isotope de l’uranium) se désintègre par émission de particules alpha qui sont très vite absorbés par la matière et Henri Becquerel enveloppant ses plaques photographiques d’épais papier, elles n’ont pu être la cause de l’impression des plaques.
Parmi les descendants de l’uranium-238, le protactinium-234 se désintègre en émettant un bêta fortement énergétique. Cinq à six millimètres de verre sont nécessaires pour absorber totalement ces électrons, aussi ceux-ci ont-ils contribué à dessiner la croix de Malte interposée par Henri Becquerel entre la plaque enveloppée de papier et une mince plaque de verre de 0,1 mm supportant les sels d’uranium.
Restent les différents rayonnements gamma émis par les descendants de l’uranium. Ces rayons gamma ont contribué à impressionner les plaques photographiques. Ils ont été atténués par l’interposition de lames de verre plus ou moins épaisses, et de feuilles d’aluminium ou de cuivre.
Avec le recul du temps les rayons uraniques de Becquerel furent les premiers rayons d’origine radioactive à être observés.
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