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Un rayonnement pénétrant mais qui s’atténue …

Parcours d’un gamma
Les photons déposent leur énergie dans la matière en transmettant leur énergie à des particules chargées. Ce photon gamma a été produit au point A, lors d’une collision d’une particule provenant d’un grand accélérateur. Après avoir voyagé sans interagir, il se matérialise au point B en transmettant son énergie à un électron et à un positon. La présence d’un champ magnétique intense courbe en sens inverse la trajectoire de ces deux particules. Celles-ci perdent leur énergie, se ralentissant et spiralent avant de s’arrêter. Cette cascade d’évènements est observée dans une « chambre à bulles ».
© IN2P3

L’effet des rayons gamma est très différent de celui de particules chargées. Alors que les rayons alpha et bêta déposent leur énergie progressivement, les photons gamma procèdent par tout ou rien. Ils ne produisent aucun effet avant d’interagir avec un noyau ou un électron. Quand ils interagissent, ils mettent en mouvement des particules chargées. Ce sont elles qui déposeront l’énergie dans la matière.

Les photons interagissent de trois façons avec la matière: par effet photoélectrique, par effet Compton, par la création de paires d’électrons et de positrons.

Effet photoélectrique
L’effet photoélectrique, mode d’interaction privilégié des photons de faible énergie avec la matière, concerne également les photons gamma. Le gamma percute un électron d’une orbite atomique interne. L’électron est alors expulsé, le photon absorbé. L’expulsion est suivie d’un réarrangement du cortège électronique de l’atome, des électrons appartenant à des orbites plus externes venant prendre la place de l’électron expulsé. Ces sauts d’orbites s’accompagnent de l’émission de photons de fluorescence (dont des rayons X) qui n’ont pas été représentés sur la figure.
© IN2P3

L’effet photoélectrique constitue le mode d’interaction dominant quand l’énergie du gamma est de l’ordre des énergies de liaison des électrons des atomes rencontrés. Le gamma arrache un électron à sa couche atomique. Il partage son énergie entre l’électron arraché et l’atome qui se retrouve dans un état excité. Ce dernier se débarrasse ensuite de son énergie d’excitation en émettant des photons dits de “fluorescence” dont des caractéristiques.

Effet Compton
Mode d’interaction privilégié avec la matière pour des photons gamma d’énergie moyenne, l’effet Compton ressemble à l’effet photoélectrique, avec cette différence que l’électron qui a absorbé le photon initial, émet un photon secondaire d’énergie moindre. L’effet Compton devient prépondérant quand l’énergie du photon devient très supérieure à l’énergie de liaison de l’électron qui subit la collision. Il doit son nom au physicien américain, Arthur Compton.
© IN2P3

A plus forte énergie, le principal mécanisme devient « l’effet Compton » qui s’interprète comme la collision d’un gamma et d’un électron atomique. L’énergie initiale se partage après la collision entre l’électron et le photon. L’électron mis en mouvement perd son énergie par ionisation comme un électron bêta. Le nouveau gamma se propage sans déposer d’énergie jusqu’à ce qu’il interagisse à son tour.

Production de paires
Le troisième mode d’interaction des photons gamma est la création d’une paire de particules, un électron et son antiparticule, un positon. Cette production ne s’observe qu’au dessus d’une énergie seuil de 1,02 MeV, énergie requise par la relation d’Einstein pour créer la masse d’un électron et d’un positon. La plupart des photons gamma issus des désintégrations radioactives n’atteignant pas cette énergie seuil, la production de paires ne concerne que les gamma les plus énergétiques. Les photons gamma de haute énergie se matérialisent principalement en passant à proximité de la charge électrique des noyaux avec lesquels ils interagissent.
© IN2P3

Quand l’énergie du gamma est supérieure à un million d’électronvolts, un nouvel effet se manifeste : la production de paires. L’énergie du gamma sert à créer de la matière et de l’antimatière : un électron et son antiparticule, le positron. Le champ électrique intense du noyau sert de catalyseur. La production de paires l’emporte sur l’effet Compton à haute énergie, mais elle demeure marginale dans le domaine de la radioactivité et du nucléaire. Par contre, les photons gamma de haute énergie produits par un accélérateur ou présents dans le rayonnement cosmique interagissent principalement en se matérialisant en une paire électron-positron.

Atténuation des gamma :

Du fait des interaction, le nombre de gamma diminue avec l’épaisseur traversée. L’intensité d’un faisceau étroit de rayons gamma diminue de manière exponentielle avec cette épaisseur. Cette décroissance est caractérisée par un coefficient d’atténuation. L’atténuation est d’autant plus rapide que ce coefficient est élevé. Ce coefficient, directement lié aux  sections efficaces d’interaction des gamma, est une mesure de leur interaction avec la matière. Il est la somme des contributions de trois effets : l’effet photoélectrique, l’effet Compton et dans une moindre mesure la production de paires.

Avec de la chance (ou de la malchance !), des gamma individuels peuvent échapper longtemps à une interaction. Les rayons gamma sont donc très pénétrants et beaucoup plus difficiles à arrêter que des alpha et bêta qui ne peuvent dépasser un certain parcours. Dans les laboratoires et auprès des accélérateurs, l’habitude est de s’en protéger par des écrans en plomb, un matériau bon marché. La comparaison des probabilités d’interaction des gamma avec le carbone et avec le plomb montre en effet qu’elles sont beaucoup plus élevées avec un noyau lourd comme le plomb.

Contributions des effets photoélectrique et Compton pour le carbone et le plomb.
La figure compare les probabilités d’interaction (sections efficaces) par effet photoélectrique et effet Compton des gamma dans le cas d’un noyau léger de carbone et d’un noyau lourd de plomb. Pour les énergies des gamma de la radioactivité allant de quelques keV à 1 à 2 MeV, les probabilités d’interaction varient de plusieurs ordres de grandeur et augmentent avec la charge électrique Z des noyaux. Aux énergies les plus basses, l’effet photoélectrique prédomine. L’effet Compton l’emporte au dessus de 20 keV pour le carbone et au delà seulement de 600 keV pour le plomb, bien meilleur absorbeur.
©  IN2P3 (Source Particle Data Group)

Les effets des rayons gamma sont beaucoup moins localisés que ceux des rayons alpha ou bêta. Ils se font sentir dans des volumes importants. C’est pourquoi les gamma du Cobalt-60 sont utilisés par exemple pour la stérilisation des aliments et la désinfection des momies. À faible dose, les gamma sont utilisés pour le diagnostic médical, car ils sont les moins nocifs en cas d’irradiations internes. C’est la raison pour laquelle, le technétium-99m, qui est l’un des rares noyaux uniquement émetteur gamma, est très recherché.