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La lumière des noyaux

On disait autrefois que tous les chemins menaient à Rome. L’adage pourrait s’appliquer aux désintégrations radioactives. Le noyau radioactif qui se transforme en un autre emprunte des chemins variés, pour atteindre un terminus unique, un noyau final stable.

L’état du noyau ayant atteint la stabilité (ou une quasi-stabilité dans le cas de filiations radioactives) est appelé par les physiciens état fondamental. C’est celui dont l’énergie est minimale. Les états intermédiaires du noyau possèdent une énergie supérieure. Ils sont dits “excités”.

Une désintégration radioactive laisse rarement le noyau dans son état fondamental. Bien plus souvent, le noyau se retrouve dans un état excité. En mécanique classique, l’énergie de l’état excité pourrait être quelconque. Mais le noyau, comme l’atome est régi par les lois de la mécanique quantique, la mécanique de l’infiniment petit. Un noyau possède un nombre limité d’états de la même façon, que les électrons d’un atome possèdent des niveaux d’énergie déterminés.

Un état excité est caractérisé par une valeur unique et spécifique de l’énergie d’excitation. Il correspond à une configuration du noyau permise par la mécanique quantique que les physiciens appellent état de “spin-parité”. L’état de spin-parité, représente en quelque sorte l’état de rotation global du noyau, dont les protons et neutrons se comportent comme des petites toupies qui peuvent aussi tourner les unes par rapport aux autres. L’état de spin est représenté par un nombre demi entier quand le nombre de nucléons est impair (par exemple 7/2) ou entier (par exemple 2) quand il est pair. La parité, une propriété quantique plus complexe à expliquer, peut être positive ou négative.

Exemple de l’iode-131
L’énergie disponible dans la désintégration bêta de l’iode 131 est importante, 970,8 keV. Huit niveaux d’énergie du noyau fils (le xénon 131) sont accessibles. Les trois voies les plus fréquentes sont représentées par les flèches rouges. 89,6 % des désintégrations bêta aboutissent au niveau d’énergie à 364,keV. Le noyau excité se désexcite alors en un gamma de 364 keV ou deux gamma consécutifs de 284 et 80 keV. Les autres niveaux rejoignent le niveau fondamental, soit directement soit en cascadant de niveau en niveau. Un ou plusieurs gamma sont émis. Seuls ceux dont la fréquence d’apparition est supérieure à 1% sont représentés sur ce schéma simplifié.
© IN2P3

Ainsi dans le cas de l’iode-131, l’énergie disponible dans la désintégration est de 970,8 keV  ; huit états excités du noyau peuvent être atteints. Le noyau qui émet un électron bêta pour se transformer en xénon-131 – le noyau fils – a le choix entre ces 8 états excités auquel il faut ajouter l’état fondamental. Les niveaux d’énergie peuvent être vus comme les barreaux d’une échelle. Après avoir atterri sur un des barreau, le noyau dégringole de barreau en barreau pour arriver au bas de l’échelle. Il peut sauter, un ou plusieurs niveaux d”énergie pour arriver plus vite à son terminus.

En sautant d’un niveau à un autre, le noyau perd une partie de son énergie d’excitation en émettant un rayon gamma dont l’énergie est égale à la différence des deux niveaux. Il peut aussi, plus rarement se désexciter par conversion interne.

Le diagramme d’une désintégration radioactive avec de nombreuses voies pour atteindre l’état fondamental sera complexe. La présence d’un spectre gamma avec leurs énergies caractéristiques constitue une signature du noyau. Si l’on dispose de détecteurs à même de mesurer avec assez de précision l’énergie des gamma, on peut ainsi identifier grâce à cette signature la présence même en quantité minime d’atomes d’une espèce radioactive.

Dans la plupart des cas, un ou deux niveaux d’énergie jouent un rôle dominant. Le diagramme se simplifie. Par exemple dans le cas de l’iode-131, 89,6 % des désintégrations bêta aboutissent au niveau d’énergie de 365,4 keV qui se désexcite en émettant un gamma unique de cette énergie, ou deux gamma successifs de 284,3 et 80,2 keV.

Sauf exception, les temps de vie des états excités sont extraordinairement brefs, se mesurant généralement en milliardième de seconde. Quand le noyau émet une série de gammas pour rejoindre l’état fondamental, L’émission de ces gamma parait simultanée.

les physiciens appellent rapports de branchement les probabilités des divers modes de désintégration.

NB: Des données détaillées sur les schémas de désintégration peuvent être trouvées sur la base de données nudat2 du Brookhaven National Laboratory : http://www.nndc.bnl.gov/nudat2/