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Engouement et florilège

Du fait de son pouvoir thérapeutique, le radium fut l’objet d’un véritable engouement jusqu’à la fin des années 30. La radioactivité apparaît alors comme une source de vie.

Nos parents et nos grands-parents recevaient de magnifiques livres reliés et illustrés lors des distributions des prix les veilles de 14 juillet. Une imaginaire course au radium concurrence ici les voyages des héros de Jules Vernes ou de Théophile Gautier.
© Musée Curie

Des stations thermales vantèrent la radioactivité de leur eau. L’industrie pharmaceutique mit sur le marché des produits à base de radium : la Tubéradine soignant la bronchite, la Digéraline facilitant la digestion, la Vigoradine luttant contre la fatigue.

Le mot « radium » devint un argument magique pour vendre des crèmes, poudres, cosmétiques, savons, dentifrices, et shampoings.

En France, la Société Tho-Radia vendait en pharmacie une crème de beauté à base de radium. Usurpant le nom de Marie Curie, sa formule était prescrite par un docteur Alfred Curie qui n’avait jamais existé. La crème, qui contenait 0,25 millionième de gramme de bromure de radium pour 100 grammes d’excipient, était sensée effacer les rides du visage : « La Science a créé Tho-Radia pour embellir les femmes. À elles d’en profiter. Reste laide qui veut ! » disait la réclame.

Cette jeune beauté des années 1930 n’a pas besoin des crèmes et des poudres au radium dont cette publicité vante les mérites. Le radium sert d’argument publicitaire, car il est probablement absent de ces produits étant donné sa rareté. La radioactivité était parée d’autant de vertus que notre époque lui attribue de vices.
© AssociationCurie/Joliot-Curie

 

Dans le quartier de l’Opéra, le laboratoire d’un certain docteur Monteil, offrait des appareils de beauté en caoutchouc radioactif : masques, mentonnières, affine-nuques, bandes-chevilles, ceintures amaigrissantes. Le caoutchouc radioactif, à porter une demi-heure par jour, « faisait maigrir rapidement sans nuire à la santé ».

Les belles des années 1920 furent heureusement protégées des charlatans par le prix très élevé des substances radioactives. Les préparations ne contenaient que de toutes petites quantité de radium, de l’ordre de 100 becquerels par gramme : elles furent de ce fait pratiquement inoffensives ( NB: Cent becquerels représentent environ l’activité d’un litre de lait, due au potassium-40. Dans les années 1920, un gramme de radium coûtait une fortune l’équivalent du prix d’un immeuble de rapport à Paris).

La laine Oradium etait préconisée pour les bébés en raison des « extraordinaires effets de stimulation organique d’excitation cellulaire transmis par le radium ».

Dans ce florilège, les humains n’avaient pas le monopole des effets miraculeux : « Radia, appât radioactif, attirait les poissons et écrevisses comme l’aimant attire le fer » ; « Provadior engraissait les animaux de ferme et de basse-cour, véritable provende française contenant du radium ».

C’est à cette époque que l’on prit conscience des dangers que présentait le radium. Exemple extrême et tragique, un industriel américain, Eben Byers, meurt en 1931 des suites d’un empoisonnement. Jeune, sportif, voulant guérir une plaie au bras qui ne cicatrisait pas, on lui avait prescrit du Radithor, une potion magique censée tout soigner, des troubles digestifs aux maladies endocriniennes. Eben Byers but de 1927 à 1931, 1000 et 1500 flacons de Radithor à raison de plusieurs par jour. À sa mort, ses os, ses dents, ses tissus étaient devenus radioactifs : chaque flacon contenait environ un microcurie de radium-226 et 228.

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