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Le premier atome radioactif découvert

Coupelle de radium
Coupelle contenant du bromure de radium, photographiée dans l’obscurité en 1922. Le radium est un million de fois plus radioactif que l’uranium. Sous l’effet de la chaleur dégagée, le radium émet une couleur bleue que Pierre et Marie Curie aimaient à retourner contempler le soir. Une coupelle contenant du bromure de radium (photo prise dans l’obscurité), 1922.
© ACJC

Le radium, élément extrêmement rare, fut découvert par Pierre et Marie Curie en 1898. Ils mesurèrent la masse et le numéro atomique de cet élément dont ils montrèrent qu’il occupait une case alors manquante du tableau de Mendeleïev. Après la mort de Pierre Curie en 1906, Marie Curie fut couronnée en 1911 pour cette identification d’un second prix Nobel, de chimie cette fois. Elle fut la première femme à recevoir cette distinction.

Le nouvel élément fut appelé radium. Il comporte 88 protons et possède plusieurs isotopes dont le principal, le Radium-226, est un émetteur alpha et gamma de 1600 ans de période radioactive. Les deux principaux isotopes du radium-226 sont le radium-224, émetteur alpha de période 3,34 jours et le radium-228, émetteur bêta et alpha de période 5,7 ans.

On trouve des traces de Radium-226 dans les minerais d’uranium, à raison d’un atome pour 3 millions. Il fait partie de la descendance radioactive de l’uranium-238 dont il est le cinquième descendant. Le Radium-226 se transforme, à son tour, en un gaz rare radioactif, le Radon-222 dont la période est de 3,8 jours.

Le hangar de la rue Lhomond
Extérieur du « hangar » de l’Ecole de Physique et de Chimie de la Ville de Paris, alors au 42 rue Lhomond, où Pierre et Marie Curie isolèrent le polonium et le radium à partir d’un minerai d’uranium, la pechblende. Il durent manipuler environ 400 tonnes de pechblende pour extraire un gramme de radium.
© ACJC

Le Curie, activité d’une source de 1 gramme de radium (37 milliards de désintégrations par seconde) servit longtemps d’étalon de radioactivité. Ce gramme de radium était la quantité que Marie Curie avait réussi à produire au prix d’efforts acharnés dans son hangar de la rue Lhomond.

Pendant la guerre de 1914, ce précieux gramme fut stocké dans les coffres d’une banque à Bordeaux. Après 1918, il fallut le persuasion et la diplomatie de Rutherford pour convaincre Marie Curie que ce trésor devait quitter son laboratoire pour servir d’étalon.

Le radium fut l’objet dans les années 1920 d’un véritable engouement. Alors qu’aujourd’hui on surestime les dangers de la radioactivité, à l’époque on n’en mesurait pas encore les risques.

Atelier des “dials painters”
Vue de l’atelier où dans les années 1920 de jeunes américaines peignaient des cadrans de réveil. La peinture luminescente qui contenait des traces de radium provoqua des cancers de la gorge chez les ouvrières qui humectaient les pinceaux de leur langue. Il fallut tragiquement du temps, une fois la cause des cancers identifiée, pour imposer aux industriels les mesures nécessaires.
© DR

C’est ainsi que l’une des premières utilisations du radium fut de rendre lumineux des chiffres sur les cadrans de pendules, réveils et boussoles. Le radium était utilisé à l’état de traces dans des peintures. En 1924, un dentiste new-yorkais, surpris de diagnostiquer des cancers de la mâchoire chez de nombreuses jeunes filles et femmes s’aperçut que ses patientes, dont le travail consistait à peindre des chiffres lumineux sur des cadrans, léchaient la pointe de leur pinceau. Mise au courant, Marie Curie comprit vite les relations de cause à effet, ce qui conduisit à l’abandon de cette pratique.

Le radium a été longtemps utilisé en radiothérapie. Il a été officiellement abandonné en 1976 pour raisons de radioprotection et remplacé par l’Iridium-192 et le césium-137.

L’épopée du radium : film de l’IRSN (2013).

La médecine s’empara du radium et en fit un outil de la lutte contre le cancer. Vanté pour ses bienfaits, le radium devint source de jouvence pour le public et source de profits pour les industriels. Il faudra du temps pour admettre le danger de ses rayonnements et interdire son usage

Recycler des sources anciennes de radium pour soigner des cancers

L’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) mène depuis 2021 une initiative mondiale pour recycler des sources anciennes de radium-226. Ces matériaux, autrefois utilisés en radiothérapie mais désormais obsolètes, peuvent être transformés en actinium-225, un radio-isotope rare et prometteur pour la thérapie alpha ciblée contre le cancer. En juin 2025, la Tunisie a transféré plus de 100 sources vers les États-Unis, et le Brésil prépare l’envoi de près de 400, dont certaines offertes il y a plus de 80 ans par Marie Curie elle-même.

Ce projet illustre comment l’économie circulaire peut s’appliquer au domaine nucléaire : donner une seconde vie à des sources radioactives pour développer des traitements médicaux de pointe. Grâce à la coopération internationale, d’autres pays rejoindront bientôt ce programme, renforçant la sécurité, la gestion responsable des déchets radioactifs et l’accès mondial à de nouveaux outils pour la lutte contre le cancer (Cf. article de l’AIEA en anglais)