Gammas et alphas
Les gamma accompagnent rarement les désintégrations alpha
Il est surprenant que l’on puisse tenir entre ses mains un échantillon de plutonium comme celui de la photographie. Comment peut-on tenir entre ses mains un élément aussi radioactif, même avec des gants épais ? Ne s’expose-t-on pas à des rayons gamma ?
Cet échantillon de plutonium de qualité militaire est majoritairement constitué de plutonium-239, un élément prés de 200 000 fois plus radioactif que l’uranium. Les particules alpha qu’il émet sont très toxiques mais elles sont arrêtées par la moindre épaisseur de matière. Des gants protègent parfaitement de ces rayons en évitant tout contact.
Restent les rayons gamma qui accompagnent les alpha. Dans le cas du plutonium-239 les gamma émis sont peu énergiques et surtout ils sont rares : 1 gamma émis pour 3000 désintégrations ! La manipulation ne doit pas être prolongée mais l’intensité relativement faible des rayonnements laisse le temps de prendre une photographie.
Des gamma rares et peu énergiques caractérisent les désintégrations du plutonium-238 (utilisé dans les sondes spatiales), du plutonium-239 et de l’uranium-238 donnés comme exemples ci-dessus. Ces deux propriétés sont propres à la plupart des noyaux lourds émetteurs alpha (une exception est celle de l’uranium-235).
C’est le cas de l’uranium et ses descendants, ce qui explique que l’exposition des êtres vivants aux rayons émanant des roches soit douce pour notre plus grand bien. C’est également le cas des isotopes du plutonium. C’est ainsi la raison de l’emploi du plutonium-238 comme source d’énergie embarquée pour les sondes spatiales lointaines.
Pour ces trois noyaux cités l’énergie des gamma est au plus de 50 keV et les fréquences inférieures à 1 pour 1000. Les énergies et fréquences sont très inférieures à ce que peut observer avec les désintégrations bêta. Ainsi, l’énergie du rayon gamma le plus fréquent émis par l’iode-131 est de 364 keV, sa fréquence de 81,5 %. Pour le césium-137, l’énergie du principal gamma est de 662 keV, sa fréquence de 85 % !
Avec les actinides mineurs présents dans les déchets nucléaires, les énergies des gamma restent basses, mais les fréquences sont plus élevées. C’est le cas par exemple de l’américium-241 émetteur d’un gamma de 59 keV avec une fréquence de 36 %. Malgré les gamma de l’américium, les actinides mineurs jouent un rôle mineur dans le rayonnement gamma intense issu d’un colis de déchets vitrifiés.
La faible énergie et la rareté des rayons gamma s’expliquent par le mécanisme des désintégrations alpha, l’effet tunnel. Pour sortir du noyau, la particule alpha doit échapper à l’attraction des autres nucléons. Elle doit franchir une barrière (la “barrière de potentiel”). Les périodes radioactives très longues des émetteurs alpha démontrent que cette barrière est déjà très difficile à franchir. Si la particule alpha doit être en plus accompagnée d’un gamma, son énergie cinétique est diminuée du montant de l’énergie de ce gamma. L’épaisseur de la barrière à franchir sera accrue et la particule alpha aura encore plus de mal à la franchir pour sortir du noyau. Ceci explique la rareté des gamma accompagnants.
L’émission d’un tel gamma signifie que la désintégration alpha a laissé le noyau dans un état excité : son énergie est pratiquement égale à l’énergie d’excitation. Pour que l’émission du gamma ne soit pas trop rare, il faut que cette énergie d’excitation soit faible. De ce fait, seuls des niveaux d’énergie de quelques dizaines de keV sont observés dans les désintégrations alpha (NB : La conversion interne l’emporte souvent sur l’émission d’un gamma comme moyen de désexcitation quand l’énergie à évacuer est faible).
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