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Un bulldozer atomique très ionisant, un bref parcours

Le sillage d’une particule alpha
Une particule alpha, 7300 fois plus lourde qu’un électron, n’est pratiquement pas déviée quand elle éjecte des électrons atomiques. Son trajet est très rectiligne. Elle laisse sur son passage un sillage d’électrons et d’atomes ionisés. Lors d’un choc très rapproché, l’électron projeté ionisera à son tour sur un très court parcours. Il arrive enfin que la particule alpha heurte un noyau. Elle est alors déviée à grand angle. De telles collisions sont rares, mais c’est ainsi que Rutherford découvrit l’existence des noyaux.
© IN2P3

Les particules alpha sont à la fois les rayons radioactifs les plus dangereux pour la matière vivante et ceux dont il est le plus facile de se protéger.

Une particule alpha éjectée d’un noyau est animée d’une vitesse très supérieure à celle des fusées les plus rapides. Cette vitesse qui atteint 9600 kilomètres par seconde pour une particule alpha de 2 MeV d’énergie, reste toutefois petite comparée aux 300 000 km/sec de la lumière. Une particule alpha est aussi beaucoup plus lourde que les électrons atomiques qu’elle est amenée à rencontrer. Le rapport des masses est de 8000 : le bœuf de la fable de la Fontaine comparé à la grenouille !

Un très court parcours !
En raison de leur pouvoir ionisant , le parcours des particules alpha dans la matière est ultra court. Dans un milieu dense comme l’eau, les alpha les plus énergiques comme ceux du polonium-212 (à gauche) ne voyagent guère que 90 microns, moins d’un dixième de millimètre. Une feuille de papier, l’épaisseur d’un vêtement suffisent pour les arrêter. L’encart montre que dans un milieu gazeux, comme l’enceinte d’une chambre à brouillard saturée de vapeur d’eau, le parcours des alpha ne dépasse pas quelques centimètres. Il est très facile de s’en protéger quand la source est extérieure.
© IN2P3

Véritable bulldozer atomique, une particule alpha est peu perturbée par les électrons qu’elle arrache aux atomes situés sur son parcours. Sa trajectoire est rectiligne. Relativement lente pour un corpuscule, elle arrache beaucoup d’électrons aux atomes qu’elle rencontre (on dit qu’elle les ionise).

La contrepartie de cette ionisation intense est un court parcours. Une particule alpha s’arrête vite. Peu pénétrante, il est donc facile de s’en protéger. Cinq centimètres d’air ou quelques dizaines de microns dans l’eau ou l’aluminium suffisent pour l’arrêter.

Le granit contient des traces d’éléments radioactifs comme l’uranium et ses descendants qui émettent des rayons alpha. Les rayons alpha produits au sein d’un bloc de granit demeurent dans la roche. Les rayons qui se produisent à la surface sont arrêtés par l’épaisseur d’une feuille de papier, d’un pantalon ou d’un gant.

Un parcours également  bien défini.
Ce cliché historique d’une chambre à brouillard de Wilson montre (à gauche) le trajet d’alpha de 9 MeV émis par une source radioactive de polonium-212. L’aspect de blaireau est du à ce que les alpha, émis avec la même énergie, ont le même parcours, aucun ne voyageant plus loin que 11,5 cm. Le même effet est illustré sur la courbe de droite, qui représente en fonction de l’épaisseur d’air traversée le pourcentage des alpha survivants. Ce pourcentage reste constant à 100% pour tomber brutalement à 0 au terme du parcours.
© IN2P3

Un émetteur alpha devient dangereux lorsqu’il se fixe dans la matière vivante. Un simple contact avec la peau ne suffit pas, l’épiderme étant suffisamment épais pour absorber les particules alpha dans ses couches “mortes”. Par contre il y a risque dans le cas d’une inhalation d’aérosols radioactifs qui se déposent sur les cellules pulmonaires, comme avec les descendants du radon. Quand un émetteur alpha se retrouve à demeure dans l’organe ou le tissu contaminé, les dégâts sont importants au niveau de la cellule car le dépôt d’énergie est maximum sur une courte longueur de quelques microns.

Les particules alpha, porteuses d’une double charge électrique positive, sont repoussées par les noyaux des autres atomes et, n’arrivant généralement pas à les atteindre par manque d’énergie, provoquent rarement des réactions nucléaires. De telles réactions nucléaires existent cependant. Ainsi, pour obtenir une source de neutrons, on bombarde des noyaux de béryllium ou de bore par les rayons alpha d’une source d’americium-241

Plus souvent, quand elles s’en approchent elles peuvent rebondir à grand angle. Ces collisions à grand angle ont joué un grand rôle dans l’histoire de la physique nucléaire. C’est en observant que des particules alpha traversant une très mince feuille d’or rebondissaient sur des objets massifs, que Geiger, Marsden et Rutherford découvrirent entre 1909 et 1911 l’existence du noyau au cœur des atomes.