LARADIOACTIVITE.COM

Une base de connaissances grand public créée et alimentée par la communauté des physiciennes et physiciens.

Plasmas, tokamaks et confinement magnétique

Intérieur du Tokamak français Tore Supra
Intérieur du tokamak de Cadarache. Dans un tokamak, le plasma est confiné par de puissants champs magnétiques à l’intérieur d’une vaste enceinte en forme de pneu. Le volume de l’enceinte qui est de 100 m3 pour Tore Supra devrait passer à 830 m3 pour ITER. Le plasma est constitué d’un mélange ténu de deutérium et de tritium porté à très haute température (150 millions de degré pour la fusion nucléaire) Les parois de l’enceinte sont couvertes de tuiles réfractaires. Tore Supra a établi le record de durée de réaction de fusion : 6 minutes et demies mais avec une puissance de fusion négligeable
© CEA

On désigne par plasma l’état particulier de la matière quand celle-ci devient totalement « ionisée », c’est–à- dire lorsque tous ses atomes ont perdu un ou plusieurs électrons périphériques. C’est l’état de la matière le plus commun dans l’univers car il se retrouve (à 99%) dans les étoiles, le milieu interstellaire et l’ionosphère terrestre. Les atomes sont devenus des ions chargés positivement « immergés » dans un « océan » d‘électrons négatifs. L’ionisation résulte d’une transformation progressive de la matière due aux collisions des atomes entre eux lors d’un chauffage de plusieurs centaines de degrés. La température du plasma doit atteindre plusieurs millions de degrés pour que la fusion nucléaire se déclenche.

Globalement neutre électriquement, le plasma, constitué de deux populations de particules chargées coexistantes, est un fluide gazeux très conducteur : il se comporte d’une façon très différente d’un liquide ou gaz classique, car les ions et les électrons sont très sensibles à la présence de champs électriques et magnétiques.

Les lignes de champ d’un tokamak
Dans un « tokamak », un ensemble de bobines produit un champ magnétique dont les lignes de champ à l’intérieur de l’enceinte torique sont circulaires. A ce champ, s’ajoute le champ magnétique créé par un courant intense axial circulant dans le plasma¨(ce courant est mis en mouvement par la bobine poloidale située au centre du tore). Les lignes de champ résultant de la combinaison des deux champs sont des hélices qui s’enroulent autour d’un tore comme celle indiquée sur la figure. Les particules du plasma s’enroulent à leur tour autour de ces lignes de champ et sont ainsi confinées dans l’enceinte.
© CEA

Tokamaks

Si l’on veut utiliser la fusion nucléaire pour produire de l’énergie, Il faut produire des plasmas à haute température et les confiner. C’est l’objectif d’appareils appelés tokamaks, des chambres de confinement magnétique en acier qui permettent de contrôler un plasma pour étudier et expérimenter la production d’énergie par fusion nucléaire. Tokamak est l’abréviation de l’expression russe toroidal’naja kamera magnetnymi katuhkami qui signifie en français chambre toroîdale avec bobines magnétiques.

Le concept des tokamaks a été inventé et mis au point dans les années 1950-60 par des scientifiques russes dont Andreî Sakharov. Le plasma est confiné à l’intérieur d’une vaste enceinte en forme de tore similaire à celle de la chambre à air circulaire que l’on rencontre habituellement dans un pneumatique de voiture ou de vélo.

Confinement du plasma par des lignes de champs magnétiques
Le champ magnétique dans un tokamak résulte de l’addition du champ généré par une série de bobines qui entourent l’enceinte et du champ produit par le courant électrique du plasma. Le champ magnétique généré par les bobines (A) est intense le long de l’axe de ces bobines. Les lignes de champ sont parallèles. Le courant électrique circulaire du plasma (B) génère un champ dont les lignes de champ entourent le courant. Les lignes de champ servent à confiner le plasma car les particules électriquement chargées qui le composent parcourent le long de ces lignes des trajectoires en hélice (C) dont le rayon est d’autant plus petit que le champ magnétique est intense.
© IN2P3

Confinement magnétique et chauffage du plasma

Pour confiner le plasma à l’intérieur de l’enceinte, on utilise des champs magnétiques intenses générés par des bobines situées autour du tore et le courant du plasma qui circule dans l’enceinte. Ce courant plasma de plusieurs millions d’ampères est généré par induction, à partir d’un puissant bobinage placé dans l’espace vide au centre du tore. En faisant varier le courant dans ce bobinage, on engendre un courant dans le plasma comme dans un transformateur électrique. Le rôle de ce courant est double : il permet de chauffer le plasma dans sa phase initiale et il contribue à son confinement.

En chaque point de l’enceinte, la direction du champ magnétique est donnée par une ligne fictive, appelée ligne de champ. De la configuration de ces lignes de champ dépend le confinement. Du fait du courant plasma, les lignes de champ circulaires des bobines situées autour du tore deviennent des hélices qui se referment sur elles-mêmes. Cet entrelacement serré des lignes de champ assure un meilleur confinement que celui qui serait obtenu par le seul champ des bobines. Ce piégeage ne suffit pas et doit être complété par des bobines appelées poloïdales qui permettent d’éviter que le plasma ne touche les parois pendant le fonctionnement de la machine.

Le confinement du plasma est basé sur la propriété qu’ont les particules chargées de parcourir une trajectoire en hélice autour d’une ligne de champ. Le rayon de giration, qui mesure l’écartement de la particule autour de cette ligne dépend de l’intensité du champ magnétique, de la masse, de la charge de la particule et de son énergie cinétique : plus le champ magnétique est intense plus ce rayon est faible et la particule reste « collée » au voisinage de la ligne de champ. Dans ces conditions, le plasma chaud, emprisonné dans une bouteille magnétique ne rentre pas au contact des parois de la chambre.

Le courant, qui chauffe le plasma dans sa phase initiale, ne suffit pas pour atteindre les températures requises pour la fusion nucléaire. On a recours à des systèmes de chauffage additionnels, par injection de particules neutres très énergétiques ou par ondes radio-fréquences selon le principe d’un four micro-onde.