Zone d’exclusion
Un no man’s land devenu réserve naturelle
Le 27 avril 1986, le lendemain de l’explosion, les autorités soviétiques procédèrent à l’évacuation de 116 000 personnes résidant dans un rayon de 30 km autour de la centrale accidentée. La zone fut évacuée dans l’urgence en 30 heures et déclarée interdite. La zone d’exclusion est depuis restée largement inhabitée, même si bravant les interdits, environ 500 personnes souvent âgées, les samosjoly sont revenus y vivre, préférant ne pas quitter les villages et les cadres de vie auxquels ils étaient attachés.
Si l’on ajoute à ces 116 000 habitants les personnes qui furent aussi évacuées en dehors de la zone, c’est au total quelques 350 000 personnes qui eurent à subir le traumatisme d’un déracinement imposé du jour au lendemain et d’un relogement.
Au centre de la zone d’exclusion se trouvent l’unité accidentée recouverte de son sarcophage, les trois autres unités qui ont fonctionné jusqu’en 2000, et à environ deux kilomètres.la ville fantôme de Pripiat dont beaucoup des 50 000 habitants étaient employés de la centrale.
L’homme parti, le règne animal a pris sa place. Ce vaste no-man’s land de près 3000 km2 est devenu en vingt ans une réserve foisonnante de vie et regorgeant d’espèces qui y règnent en maître. Les élans, les daims, les sangliers se sont multipliés avec à leur suite des loups, ainsi que des centaines d’espèces d’oiseaux. Des lynx ou des grands-ducs que l’on n’avait plus vus depuis des décennies sont réapparus. Les empreintes d’un ours ont même été relevées, un animal qui n’avait plus foulé le sol de cette partie de l’Ukraine depuis des siècles.
Selon le mot d’un radioécologiste ukrainien, Sergey Gaschak, interrogé par la BBC, les animaux occupent leurs territoires sans se préoccuper de radiations qu’ils ne ressentent pas: ‘Il y a peut-être du plutonium dans la zone, mais il n’y a pas d’herbicide ou de pesticide, d’industrie, de circulation et les marais ne sont pas asséchés … De nombreux oiseaux nichent dans le sarcophage, des étourneaux, des pigeons des hirondelles, des rouges-queues. J’ai vu des nids et j’ai trouvé des œufs.’
Ce paradoxal paradis terrestre n’était pas aussi idyllique quand les niveaux de radiations étaient beaucoup plus élevés dans les premières semaines après l’accident. Dans la forêt rouge, proche du réacteur, 4 km2 de pins devinrent bruns roux et périclitèrent. Dans les endroits les plus radioactifs, des animaux moururent ou arrêtèrent de se reproduire.
Depuis les radioéléments les plus actifs à courte période ont disparu et la radioactivité a décru. La Nature et les animaux se sont adaptés à des conditions plus clémentes. Les mutations de l’ADN observées n’ont généralement pas affecté la physiologie de l’animal ni sa capacité à se reproduire.
De gros animaux, comme les daims ou les élans, qui parcourent des distances importantes, entrant et sortant de terrains très contaminés sans y rester longtemps, sont moins exposés que de petits animaux qui y restent confinés leur vie durant. Mais il existe des signes que ces petites créatures s’adaptent aux circonstances. Sergey Gaschak a trouvé que les souris qui vivaient au milieu des pins rabougris et déformés de la forêt rouge vivaient aussi longtemps que celles habitant sur des terrains plus propres, mais que ces dernières résistaient mal à une transplantation dans l’environnement contaminé de cette forêt.
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