Scénarios d’accidents
Erreurs humaines, défauts de conception, cataclysmes naturels
Un accident d’origine nucléaire éclipse dans l’opinion tous les autres. Par exemple, celui de Tokaï-Mura en 1999 survint en même temps qu’une explosion dans une mine de charbon d’Ukraine. La mort tragique des 80 mineurs ukrainiens passa inaperçue, alors que les circonstances de l’accident japonais furent l’objet d’une large couverture. Plus près de nous, l’accident de Fukushima ne semble pas avoir fait de victime directe à ce jour, mais il a bien davantage effrayé l’opinion que les 18 000 morts du tsunami japonais.
L’idée est bien ancrée dans l’esprit du public que les réacteurs sont des bombes atomiques en puissance, les accidents de réacteurs des sortes d’explosions nucléaires. À tort, car si un très grave accident peut résulter d’un emballement de la réaction en chaîne, les phénomènes qui entraînent la dissémination des matières radioactives ne sont pas nucléaires : incendies, explosions chimiques ou pertes de refroidissement.
Bien que la distinction soit académique, un accident de réacteur, même de gravité extrême, ne peut conduire à une explosion nucléaire. L’architecture d’un réacteur, sa “géométrie”, en particulier la distance entre les éléments combustibles, ont été conçus pour que le nombre de neutrons ne puisse s’emballer. Tout désordre grave qui survient dans le cœur : vaporisation de l’eau, fusion du combustible, est fortement anti-réactif, c’est-à-dire qu’après une pointe de puissance brève, mais qui peut être très forte, la réaction en chaîne s’arrête d’elle-même.
Des automatismes interviennent pour arrêter immédiatement le réacteur, c’est-à-dire les réactions de fission. Ces automatismes, qui sont nécessaires du fait qu’il faut réagir dans un délai court, ont fait preuve de leur efficacité. À Tchernobyl ils avaient été désactivés pour une expérimentation.
Lors de cet accident, il n’y a pas eu d’explosion nucléaire mais une pointe de puissance non contrôlée qui a conduit à la fragmentation des crayons de combustibles sous l’effet de la chaleur. Cette fragmentation a provoqué une explosion des pastilles d’oxydes d’uranium au contact de l’eau puis une seconde déflagration due à un dégagement d’hydrogène. Celle-ci a soulevé la dalle supérieure du réacteur. Ensuite le graphite qui servait de modérateur a pris feu.
À Three Mile Island, il y eut fusion de cœur en raison d’une perte de refroidissement, mais la radioactivité resta confinée. C’est parce que l’on craignait une explosion en raison de la présence d’hydrogène que l’on a évacué la population.
Mais arrêter le réacteur ne suffit pas, le cœur continuant de dégager une chaleur importante du fait des décroissances radioactives. Il faut assurer un refroidissement suffisant. Le plus récent et grave accident de Fukushima est dû à une perte de refroidissement. Cette perte a duré plusieurs jours. Elle a été causée par un cataclysme, le raz de marée qui a frappé le Japon le 11 mars 2011.
Les enceintes de confinement dont sont aujourd’hui dotés les réacteurs sont conçues pour que la radioactivité reste confinée en cas de fusion du cœur, l’accident le plus grave qui se traduit par la perte du réacteur. Une telle enceinte manquait à Tchernobyl. L’enceinte joua parfaitement son rôle à Three Mile Island. Celles de Fukushima le jouèrent imparfaitement, laissant des produits radioactifs volatils s’échapper dans l’atmosphère.
Il y a aussi des accidents attribués au nucléaire qui n’en sont pas. Ainsi en 2004, quatre techniciens furent mortellement brûlés par un jet de vapeur dans une centrale japonaise. La société exploitante fut accusée de n’avoir pas contrôlé l’état de ses canalisations. Mais le jet de vapeur n’était pas radioactif et l’accident aurait pu se produire dans une autre industrie.
ENSEIGNEMENTS TIRÉS D’ACCIDENTS NUCLÉAIRES
– 1) : Enseignements tirés des accidents
– 2) : Feu de Zirconium consécutif à un arrêt du refroidissement
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