Réacteurs EPR
EPR : réacteur de troisième génération à eau pressurisée
Un exemple de réacteurs de « troisième génération » est l’EPR (European Pressurized water Reactor) dont un premier exemplaire a été commandé par la Finlande en 2003, puis un second en France pour le site de Flamanville et ensuite deux autres en Chine à Taishan. Deux autres EPR de 1600 MWe devraient être construits au Royaume-Uni à Hinkley Point dans le Sommerset, une renaissance pour un parc de réacteurs très âgés.
L’EPR est une version évoluée des derniers réacteurs à eau pressurisée français et allemands. Il résulte d’un travail de EDF et Framatome-ANP, filiale commune de Areva et de Siemens. Si l’électronucléaire se développe, l’EPR assurera une bonne transition pour l’arrivée de réacteurs qui suivront, dits de quatrième génération. Il produira de l’électricité sans émission de gaz à effet de serre et génèrera la matière fissile nécessaire au démarrage d’un parc de réacteurs surgénérateurs.
Une nouvelle filière signifie des plâtres à essuyer. La construction des premiers EPR s’est avérée particulièrement lente en Europe. Le réacteur d’Olkiluoto en Finlande qui était être construit le premier a pris plusieurs années de retard avec un procès entre AREVA-Siemens et l’électricien finlandais TVO. Il est finalement entré en service en décembre 2021 avant Flamanville. En phase d’essais, il devait fonctionne dans les premiers mois à 25 % de sa puissance.
L’EPR français de la centrale de Flamanville, construit par EDF, a pris encore plus de retard. Après un démarrage prévu fin 2018, la date évoquée de 2022 fut d’abord reportée à 2023 ! Parmi les déboires, les contrôles de soudures rendus nécessaires par le phénomène de corrosion sous contraintes observé sur des réacteurs REP en service. Les contrôles s’avérèrent plus longs que prévus. La pandémie du Covid-19 retarda le travail de certaines équipes.
Fin avril 2024, l’Autorité de Sûreté Nucléaire, autorisait après consultations du public la mise en service de l’EPR de Flamanville, ultime étape menant au chargement en combustible du réacteur, les installations étant prêtes pour ce chargement. Le 3 septembre 2024, après autorisation de l’Autorité de Sûreté, l’EPR de Flamanville a enfin divergé. L’ASN assurera le contrôle des étapes ultérieures du démarrage du réacteur, jusqu’à l’atteinte de sa puissance nominale.
Malgré les déboires de l’EPR de Flamanville, EDF a le projet de construire 6 unités d’ici 2035 pour remplacer les 14 réacteurs REP qui devraient être arrêtés à cette date. La conception de ces futurs EPR a été simplifiée.
Les déboires de l’EPR ont de multiples causes. Outre l’indécision des divers gouvernements successifs concernant l’avenir de l’énergie nucléaire, la principale est sans doute une perte d’expertise de la filière nucléaire française. Elle était auparavant une des meilleures du monde, mais la date de la mise en service du dernier réacteur REP remonte à 1997 !
Ainsi, il fut question en 2015/2016 de problèmes de soudures sur la cuve du réacteur de Flamanville, peut être en raison d’une pénurie de soudeurs qualifiés. A la même époque, la Chine avait en chantier 20 réacteurs en même temps que les EPR de Taishan. Elle avait acquis dans le domaine toute l’expertise nécessaire. Ce sont les EPR chinois de Taishan, dont la construction fut postérieure, qui furent les premiers à être connectés au réseau à l’été 2018 (En juillet 2021, le réacteur 1 fut mis un moment à l’arrêt en raison de fuites sur les barres d’assemblages de combustible).
De gros efforts ont été déployés avec l’EPR pour améliorer la sûreté : une double enceinte assurant le confinement des matières radioactives en cas de grave accident comme la fusion du cœur ; des dispositifs redondants de sûreté et de contrôle du réacteur pour prévenir les conséquences d’un dysfonctionnement ou d’une agression, chacun des dispositifs étant capable de contrôler à lui seul le réacteur.
Le réacteur serait plus propre en termes d’environnement que les réacteurs du parc existant. Par comparaison avec les dernières unités de 1300 MWe, les rejets thermiques du réacteur de Flamanville seront inférieurs, à quantité d’électricité égale, en raison de l’amélioration du rendement. Les rejets chimiques seraient divisés par 2, les effluents radioactifs réduits de 30% (hors Carbone 14 et tritium). La réduction des déchets radioactifs serait aussi de 30 % grâce à l’amélioration du rendement et l’augmentation des taux de combustion (burn-up).
L’EPR pourrait contribuer à la stabilisation des stocks de plutonium grâce à un recyclage plus efficace de cet élément fissile. Son fonctionnement plus souple autorise une diversité dans le choix du combustible. Bien que la possibilité ne soit pas prévue pendant les premières années de fonctionnement des réacteurs d’Olkiluoto et de Flamanville, il pourrait brûler un combustible à base d’uranium incluant de 15 à 50 % de MOX, combustible mixte contenant du plutonium .
Malgré le coût d’une sécurité accrue, l’EPR se veut enfin plus économique et performant que les REP les plus récents. Ces gains en compétitivité résulteraient d’un rendement de 37 % au lieu de 34 %, d’une utilisation meilleure du combustible (le taux de combustion ou énergie produite par tonne de combustible serait porté de 45 à 60 GWj/tonne) et à un effet de taille ( une puissance électrique de 1550 à 1600 MWe par tranche au lieu de 1450). La durée de vie attendue de ces réacteurs serait de 60 ans au lieu de 40 ans.
Ce que l’EPR ne fait pas. Il n’est pas surgénérateur : sa consommation d’uranium 235 (fissile) reste trop élevée pour un développement durable de l’électronucléaire. De plus, il ne brûlerait pas les actinides mineurs qu’il génère contrairement aux réacteurs de quatrième génération qui le feraient. Un parc constitué uniquement de réacteurs à eau pressurisée ne permettrait pas d’éliminer les déchets à vie longue. Il faudrait lui associer quelques réacteurs spécialisés dans l’incinération des actinides mineurs, par exemple des réacteurs hybrides.
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