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Les cendres de la fission

Les produits de fission sont les restes d’un noyau lourd d’uranium ou de plutonium qui s’est fragmenté à la suite de la capture d’un neutron. Cendres de la fission, ils contribuent à l’essentiel de la radioactivité présente dans le combustible irradié des réacteurs. Le reste est constitué des actinides, résultant de captures de neutrons non suivies de fission.

Deux fragments de tailles inégales
La répartition des produits de fission de l’uranium-235 sur la carte des noyaux montre clairement une fragmentation en deux noyaux de taille inégale. On aperçoit deux groupements distincts. Les noyaux produits le plus abondamment apparaissent en rouge (l’abréviation pcm signifie un sur cent mille). Les produits de fission possèdent aussi un excédent de neutrons hérité de l’uranium. Ils se situent en dehors de la ligne de stabilité représentée en tirets. C’est pourquoi ils sont radioactifs.
© Clés CEA

Le noyau d’uranium ou de plutonium se fragmente généralement en deux morceaux de tailles inégales, Laurel et Hardy de la Nature: un noyau léger comportant de 80 à 110 nucléons et un noyau plus lourd de 130 à 155 nucléons. La répartition des produits de fission dépend peu du noyau qui a fissionné : uranium-235 ou plutonium-239.

Les deux fragments sont très radioactifs au moment de leur création, car l’héritage du fort excès de neutrons du noyau fissile leur confère une forte instabilité. Un noyau d’uranium-235 qui contient 143 neutrons et 92 protons contient 61 % de neutrons, alors que pour être stable des fragments lourds ou légers doivent en contenir moins de 57 %. Les fragments bruts retrouvent la stabilité en corrigeant cet excès grâce à une cascade de désintégrations bêta qui transforment les neutrons en protons.

Des fragments de fission frais riches en neutrons
Les fragments frais héritent de la proportion de neutrons du noyau qui a subi la fission. Sur la carte des noyaux, ils sont situés sur la ligne droite qui relie l’origine à l’uranium. Sur cet exemple, on voit que les fragments frais (Br-90 et Xe-143) se retrouvent dans la domaine (colorié en bleu) des noyaux instables excédentaires en neutrons, radioactifs bêta-moins. Les deux fragments vont rejoindre la zone des noyaux stables ou quasi stables figurés en noir sur la carte au moyen d’une double cascade de désintégrations bêta. L’encart montre le parcours du fragment de brome-90 qui aboutit à un noyau stable de zirconium-90.
© IN2P3

Les fragments « cascadent » rapidement au début. Le temps de retour à la stabilité est extrêmement variable. Quelques jours suffisent pour un produit de fission à 140 nucléons, alors qu’un fragment à 137 nucléons mettra 30 ans et un autre à 99 nucléons 210 000 ans.

Après deux ou trois ans de séjour dans le cœur d’un réacteur, environ deux tiers des produits de fission sont devenus stables lors de la sortie du combustible irradié et de son premier entreposage dans une piscine attenante au réacteur. Ce combustible irradié contient donc encore une fraction importante de fragments de fission encore instables. Les plus radioactifs aux durées de vie les plus courtes, retrouveront assez vite la stabilité. Au bout de 10 ans d’entreposage la fraction qui a atteint la stabilité atteint 90 %. Restent 10 % de produits de fissions moins actifs dont les durées de vies sont qualifiées de courtes (mais sont en réalité d’une trentaine d’années) et de longues.

Les produits de fission à vie longue mettront beaucoup de temps à disparaître. C’est leur durée de vie plutôt que leur activité qui est gênante. Les produits de fission à vie courte sont au départ beaucoup plus radioactifs que les actinides qui contribuent également à l’activité des déchets, mais ils disparaissent plus rapidement. Ainsi, il faut environ 200 ans pour que l’activité des actinides prennent le pas sur celle des produits de fission dans un assemblage de combustible irradié non retraité (Durant ces 200 ans, les produits de fission ont décru de 500 fois).

Les produits de fission appartiennent à un grand nombre d’espèces chimiques. La plupart se fixent dans le combustible sous forme d’oxydes solides. Certains sont des métaux nobles qui restent en place. Les plus mobiles sont ceux qui sont gazeux comme l’iode ou les gaz rares.

LE CEA-Irfu a réalisé une vidéo expliquant entre autres la carte des noyaux et la vallée de stabilité. Cette vidéo inclut à la minute 4:56 une courte séquence qui décrit la fission et le parcours des produits de fission : voir la vidéo