LARADIOACTIVITE.COM

Une base de connaissances grand public créée et alimentée par la communauté des physiciennes et physiciens.

France : les lois de 1991 et de 2006

France : une loi pour les déchets radioactifs
La France s’est dotée en 1991 d’une loi sur les déchets radioactifs. Cette loi est plus connue sous le nom de son auteur et inlassable artisan, le député du Nord Christian Bataille. Elle a fait l’objet d’un réconfortant consensus, les députés et sénateurs de tous bords retrouvant pour traiter cette question d’intérêt général l’unité et le sens des responsabilités. Une nouvelle loi a été votée en juin 2006, qui prolonge de 1991 et fixe de nouvelles échéances.
©  DR

La France s’était dotée en 1991 d’une loi pour organiser la gestion des déchets radioactifs, la loi Bataille. Cette loi, qui porte le nom de son promoteur infatigable et respecté, faisait suite à des études antérieurs notamment celle de la Commission Castaing. Elle est maintenant prolongée par une nouvelle loi promulguée le 28 juin 2006. C’est dans ce cadre législatif qu’a été lancé un important programme de recherches dont l’objectif était de définir la gestion la plus appropriée des déchets les plus radioactifs.

Les recherches organisées portent sur trois grande thèmes, encore appelés axes :
– 1) La séparation et la transmutation des noyaux radioactifs à vie longue ;
– 2) Le stockage en formation géologique profonde des déchets « de haute activité à vie longue » ;
– 3) Le conditionnement des déchets et leur entreposage qui peut être aussi de longue durée.

La loi Bataille avait prévu un moratoire pour les premières prises de décision et fixé un rendez-vous en 2006 pour établir un bilan de ces recherches. Durant 15 ans, de 1991 à 2006, de nombreux rapports d’étapes tinrent le Parlement informé de l’avancée des travaux.

Complémentarités
La figure illustre la complémentarité des recherches sur les déchets radioactifs. Grâce au « conditionnement » amélioré, on renforcera les barrières constituées par les colis et les conteneurs, barrières qui s’ajouteront à celles des ouvrages en béton et de la couche géologique du « stockage en profondeur ». La « séparation-transmutation » réduira la quantité des déchets à enfouir et un « entreposage » prolongé les dimensions des installations de stockage du fait d’un refroidissement des colis.
©  SKB

Ce moratoire était empreint de sagesse. La gestion de ces matières est peu urgente si l’on dispose, ce qui est le cas, de solutions d’entreposage bien maîtrisées. Leur volume est modeste. Avec le temps qui passe elles se refroidissent, perdent une partie de leur radioactivité et deviennent plus faciles à manipuler. Le moratoire offre un délai utile pour mûrir des technologies et peser des choix qui engagent les générations futures.

Les pouvoirs publics ont confié au Commissariat à l’énergie Atomique (CEA) le pilotage des recherches sur les axes 1 (Séparation et Transmutation) et 3 (Conditionnement et entreposage) et à l’Agence Nationale pour les Déchets Radioactifs (ANDRA) le soin de piloter les recherches de l’axe 2 sur le stockage. Le CEA et l’ANDRA collaborent avec des laboratoires du CNRS et Universitaires ainsi qu’avec EDF et AREVA les industriels producteurs et gestionnaires des déchets. Toutes ces recherches font l’objet de collaborations internationales, principalement européennes. Le financement des ces recherches s est assuré par une contribution des industriels selon le principe « pollueur payeur » (contribution inclue dans le prix du kilowattheure) et une dotation inscrite au budget du CEA.

Une Commission nationale d’évaluation, la CNE, a été chargée de suivre et de donner son avis sur l’évolution des recherches. Composée de douze personnalités, dont quatre experts scientifiques, la CNE établit des rapports qui sont soumis à l’Office Parlementaire de Choix Scientifiques et Techniques (OPCST).

Trois axes de recherches complémentaires

Les trois voies de recherches de la loi Bataille et de celle de 2006 proposent une panoplie de moyens de gestion. Elles se voulaient complémentaires plutôt que concurrentes. Christian Bataille lui-même, le promoteur de la loi de 1991, ne souhaitait pas « faire monter sur le podium » un de ses axes de recherches.

Par exemple, il est certain que l’on n’échappera pas à la nécessité de construire de grands centres de stockages, mais la transmutation en détruisant certains déchets gênants pourrait réduire considérablement le volume des déchets ultimes à enfouir. Par ailleurs, la sécurité d’un enfouissement ne pourra que bénéficier de conditionnements améliorés et un entreposage raisonnable permettra de tirer profit du progrès des techniques.

Trois axes de recherche
Les trois voies de recherches définies dès 1991 par la loi Bataille ont pour but de répondre aux questions encore ouvertes sur les déchets radioactifs et d’offrir une panoplie de moyens de gestion. Elles sont complémentaires. La première explore les possibilités de tri et de destruction de certains atomes radioactifs, la seconde porte sur le stockage profond de déchets de haute activité qui sera inévitable. La troisième vise à améliorer le conditionnement des déchets et à permettre de longs entreposages .
©  IN2P3

Axe 1 : Séparation et transmutation
Les recherches sur la séparation s’intéressent aux méthodes de trie des déchets nucléaires. On irait plus loin que le tri pratiqué aujourd’hui à l’échelle industrielle qui se limite à séparer l’uranium et le plutonium des produits de fission et des actinides mineurs. On cherchera par exemple à séparer un produit de fission comme le césium pour le conditionner à part.

La séparation devient particulièrement intéressante si elle est suivie d’une transmutation. Il deviendrait possible alors de faire disparaître des radioéléments comme les actinides mineurs qui représentent moins d’un millième de la masse du combustible usé, mais dont les durées de vie sont très longues. Pour transmuter les actinides en des produits radioactifs de courte période, voire en éléments stables, il faut des réactions nucléaires et passer en réacteur. Avec quels réacteurs peut-on aboutir à une transmutation qui ait un rendement satisfaisant ?

Axe 2 : Stockage en profondeur
Les déchets ultimes, que nous ne savons exploiter actuellement, peuvent-ils être enterrés sans dangers en profondeur ? Dans quels types de sols ce stockage est-il envisageable ? Comment assurer la pérennité d’un tel stockage sur des périodes longues ? Combien de temps un tel stockage doit-il être réversible ? Si d’aventure nos descendants découvraient un moyen d’exploiter ces déchets, ou de les faire disparaître, pouvons nous faire en sorte qu’ils soient capables de les extraire du site de stockage ?

Axe 3 : Conditionnement et entreposage

Il existe déjà de bons conditionnements pour de multiples types de déchets ? Peut-on les améliorer, les rendre plus résistants, les adapter au type de d’atomes radioactifs à immobiliser ?

Les combustibles usés et les déchets vitrifiés sont déjà entreposés dans des installations prévues pour durer quelque dizaines d’années. Peut-on prolonger ces installations sur des durées allant jusqu’à 300 ans ? Ces entreposages doivent-ils être en surface où à faible profondeur ? Comment assurer sur une aussi longue durée la surveillance et le bon état de telles installations qui précèdent mais ne remplacent pas un stockage ?

DOCUMENTS D’ÉVALUATION 2006-2007

Rapport final 2006 de la CNE (pdf)
Loi de 2006 : Rapport Bataille-Birraux (N°3973 – Assemblée Nationale)

Accidents rayonnements ionisants