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Trier les radioéléments dans les déchets radioactifs

La séparation des matières radioactives présentes dans le combustible usé des réacteurs est déjà pratiquée à l’échelle industrielle à la Hague avec l’extraction de l’uranium et du plutonium. Il est envisagé de pousser plus loin cette séparation. La “séparation poussée” pourrait précèder la transmutation de déchets nucléaires ainsi séparés. Elle constitue le premier volet de l’axe 1 de la Loi Bataille puis de la loi de 2006, la transmutation constituant le second.

L’objectif est de réduire la toxicité des déchets de haute activité en retirant des matières très radioactives certains éléments à vie longue afin de les « transmuter » en isotopes stables ou à vie courte. Idépendamment des perspectives de transmutation, un tri des espèces radioactives permettrait d’alléger la radioactivité de colis destinés au stockage et d’en améliorer la gestion.

Atalante : études des procédés de séparation
Télémanipulation d’une aiguille de combustible irradié dans le caisson réception de la Chaîne Blindée du laboratoire ATALANTE à Marcoule. La chaîne a démarré en 2004 une série d’expérimentations sur la faisabilité technique de la séparation poussée. Pour cela, l’installation a reçu 15 kg de combustibles irradiés ; dans un premier temps, l’uranium et le plutonium sont séparés, puis les lanthanides et les actinides mineurs et enfin l’américium et le curium.
©  CE

Les éléments radioactifs à extraire en priorité sont des noyaux plus lourds que l’uranium, les actinides mineurs : l’américium, le curium et à un moindre degré le neptunium. Ensuite on cherchera à séparer des produits de fission à vie longue, moins toxiques mais mobiles, comme l’iode-135, le technétium-99 et le césium-135. Pour les éléments qui ne se prêtent pas à la transmutation, il peut être intéressant de les conditionner à part.

Les recherches visent à mettre au point une gamme de procédés de séparation, dont il faut démontrer la faisabilité d’abord scientifique, puis technique et enfin industrielle. Le domaine est inexploré. Qui s’intéresseraient aux propriétés d’éléments aussi rares que les actinides mineurs  s’ils ne faisaient partie des déchets radioactifs ! Il a fallu mettre sur pied des installations lourdes comme en France le laboratoire ATALANTE du CEA à Marcoule, une installation remarquable unique à ce jour au monde.

Un des aspects principaux des recherches sur la séparation est le choix de molécules extractantes ayant une affinité pour l’atome radioactif à sélectionner, lequel se comporte comme un atome ordinaire avant qu’il ne se désintègre.

Dans ces installations spécialisées sont mises au point et choisies des molécules ayant des affinités pour les radioéléments à séparer. Ces molécules “extractantes” doivent être sélectives en ne sélectionnant que les espèces visées. Elles doivent aussi être résistantes à l’environnement des solutions très radioactives qui les contiennent, dont l’activité est de l’ordre de 5 terabecquerels (TBq par litre.

La séparation de produits très radioactifs relève de la “chimie chaude. C’est une opération difficile et coûteuse. Les équipes d’ATALANTE à Marcoule ont trouvé et défini des molécules extractantes sur 15 kg de combustibles usés. Fin 2013, elles avaient démontré que l’on savait récupérer plus de 99 % des actinides mineurs.

La « Chaîne Blindée Procédés » d’Atalante
La Chaîne Blindée Procédés, construite dans Atalante, est l’une des plus importantes installations du CEA pour l’expérimentation sur les matières radioactives. Cet outil permet notamment de tester des procédés de traitement de combustibles usés sur des quantités significatives et sur de longues durées. Il utilise des technologies représentatives de celles qui seraient mises en œuvre à l’échelle industrielle.
© CEA

La transmutation des actinides mineurs (neptunium, américium, curium) est envisagée selon deux scénarios très différents, qui ont des implications sur les procédés de séparation associés.

Selon un premier scénario, les actinides mineurs seraient transmutés dans des réacteurs spécialisés pour cela. Dans ce cas, il faut continuer à séparer l’uranium et le plutonium comme aujourd’hui pour les diriger vers les réacteurs producteurs d’énergie et, parallèlement séparer de façon sélective les actinides mineurs retenus pour les incinérer dans ces réacteurs dédiés. C’est la séparation poussée poursuivie actuellement. Les équipes d’Atalante qui travaillent sur la séparation poussée à Marcoule ont bon espoir d’en prouver la faisabilité technique.

Dans le second scénario, le recours à de réacteurs à neutrons rapides permettrait de brûler efficacement les actinides mineurs mélangés aux combustibles classiques tout en produisant de l’énergie en quantité. Dans ce cas, il ne sert à rien de séparer les actinides mineurs de l’uranium et du plutonium puisqu’ils seront de nouveau mélangés dans le réacteur-brûleur. Ceci impose une refonte complète du procédé de séparation actuel, afin d’extraire en une seule fois si possible tous les actinides mineurs avec l’uranium et le plutonium. C’est ce que l’on appelle la séparation groupée. Des recherches ont été lancées dans cette perspective nouvelle.

AXE 1 : RÉSULTATS ET PERSPECTIVES SUR LA SÉPARATION

– 1) : Séparation : résultats obtenus
– 2) : Séparation : perspectives