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Une grande souplesse dans le choix d’un combustible

Les réacteurs nucléaires classiques utilisent des combustibles à base d’uranium dont le minerai naturel est le seul à contenir une petite quantité un isotope fissile, l’uranium-235. L’appoint (grâce à l’accélérateur) d’une abondante source externe de neutrons rapides capables de fissionner d’autres noyaux que l’uranium-235 élargit considérablement le choix du combustible. Les neutrons rapides permettent une meilleure utilisation du combustible, car les captures de neutrons sur les fragments de fission qui limitent le taux de combustion sont moindres qu’avec des neutrons thermiques.

Un long chemin vers les actinides
Dans un réacteur hybride seule une infime fraction des noyaux de thorium, constitués de 232 nucléons se transforme en actinides. Il faut au moins cinq captures de neutrons pour produire le neptunium-237, sept pour le plutonium-239 et davantage pour les autres isotopes du plutonium et l’américium. Il est très difficile pour un noyau de thorium de subir autant de captures. Dans un réacteur, il s’écoule des mois, voire des années entre deux captures successives. De plus, chaque capture peut provoquer la destruction de ces noyaux lourds par fission. Enfin, les désintégrations bêta entrent en compétition avec les captures.
© IN2P3 (Source J.P.Revol).

Les réacteurs hybrides utiliseraient comme combustible du thorium, constitué à l’état naturel d’un seul isotope, le thorium-232. Le thorium est 3 à 4 fois plus abondant dans la croûte terrestre que l’uranium (principalement à cause de sa non-solubilité dans l’eau, contrairement à l’uranium qu’on retrouve par conséquent dans la mer). Il apparaît sous forme de thorite dans des phosphates de terres rares (monazites) à des teneurs beaucoup plus élevées que l’uranium.

Partir du thorium pur ne serait pas économique. Le matériau n’est pas fissile, seulement fertile. Il faudrait des années pour atteindre la puissance nominale. Il est nécessaire d’ajouter un élément fissile pour démarrer. Le passage en réacteur va générer ensuite un élément fissile, l’uranium-233, analogue au plutonium dans les réacteurs classiques. Ce noyau résulte de la capture d’un neutron par le thorium-232. Cette capture produit d’abord du thorium-233 qui transforme rapidement ensuite en protactinium-233, lequel se désintègre finalement avec une période 27 jours en uranium-233.

Un bilan neutronique montre que les fissions prélèveraient environ 40 % des neutrons, 20 % seraient perdus mais 40 % serviraient à la génération d’uranium-233. On voit que de cette façon, une matière fissile fraîche remplacerait celle consommée.

On ajouterait donc pour démarrer comme élément fissile, soit de l’uranium-233 provenant d’une décharge précédente, du plutonium-239 (civil ou militaire) ou tout simplement des transuraniens, puisqu’ils fissionnent tous avec des neutrons rapides. Une stratégie proposée consisterait à fissionner dans un réacteur hybride (ADS) tous les transuraniens (plutonium et actinides mineurs) en les utilisant comme éléments combustibles mélangés à du thorium et à de l’uranium-233.

De tels combustibles à bases de thorium remédieraient à l’un des handicaps des filières à uranium : la production d’actinides considérés comme les déchets les plus gênants à long terme. De tels combustibles ne produiraient pas de transuraniens (plutonium et actinides mineurs) en raison du nombre élevé de captures de neutrons requises pour passer du thorium aux transuraniens. En remplacement, les captures de neutrons produiraient des isotopes de l’uranium, beaucoup plus stables donc moins radioactifs, que le plutonium et les actinides mineurs. C’est un avantage essentiel.

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