Un accident aux USA : les médias en premiÚre ligne
Evacuation prĂ©cipitĂ©e, atmosphĂšre de fin du monde, tĂȘtes de mort, journaux et chanes de tĂ©lĂ©vision ne lĂ©sinĂšrent pas sur le sombre dans leur couverture de lâaccident. La coĂ»teuse perte dâun rĂ©acteur neuf passa au second plan. MalgrĂ© lâimpression dâapocalypse, lâaccident ne fit pas de victimes. ©
Lors de lâaccident de Three Mile Island, ce furent le vendredi 30 et le samedi 31 mars qui frappĂšrent le plus les esprits : deux journĂ©es de craintes, de stress et de confusions. Pourtant lâaccident proprement dit Ă©tait maĂźtrisĂ© depuis la fin de la journĂ©e du mercredi 28, le rĂ©acteur avait Ă©tĂ© arrĂȘtĂ© dĂšs la premiĂšre anomalie et le refroidissement du cĆur endommagĂ© rĂ©tabli en fin de journĂ©e.
Le vendredi 30 mars, deux Ă©vĂ©nements marquĂšrent un tournant dans la perception de lâaccident. La Nuclear Regulatory Commission, la NRC, prit connaissance de la hausse soudaine de la pression du rĂ©acteur observĂ©e en salle de contrĂŽle le mercredi aprĂšs-midi ; Le matin du mĂȘme jour, des gaz radioactifs furent volontairement relĂąchĂ©s du bĂątiment auxiliaire dans lâatmosphĂšre.
La hausse de la pression Ă©tait due Ă une accumulation de 320 kg dâhydrogĂšne consĂ©cutive Ă une fusion partielle du cĆur suivie dâune dĂ©tonation sans effets importants. Les spĂ©cialistes vont redouter que lâhydrogĂšne continue Ă sâaccumuler pour former une « bulle » sous le dĂŽme de lâenceinte de confinement. Lâexplosion de cette âbulleâ aurait eu des consĂ©quences dramatiques pour les populations, Ă©tant donnĂ© la trĂšs forte concentration de radioactivitĂ© dans lâenceinte.
Le relĂąchement gazeux Ă©tait essentiellement constituĂ© de xĂ©non-133, isotope dâun gaz rare difficile Ă capturer mais inerte chimiquement et biologiquement. Au moment de la sortie du gaz de la cheminĂ©e du bĂątiment auxiliaire, on mesura une dose de 12 mSv, Ă©quivalente Ă 5 annĂ©es dâexposition Ă la radioactivitĂ© naturelle. Le xĂ©non se dilua ensuite rapidement dans des kilomĂštres cubes dâair autour de la centrale !
Sorti 15 jours avant lâaccident de Three Mile Island, le film « The Chinese syndrome » eut un Ă©cho considĂ©rable et alimenta le mouvement contre lâĂ©nergie nuclĂ©aire aux USA. Dans le film, Kimberley Wells, journaliste Ă la tĂ©lĂ©vision interprĂ©tĂ©e par Jane Fonda, filme au cours dâun documentaire un incident Ă la centrale nuclĂ©aire de Ventana. Son camĂ©raman le montre Ă un ingĂ©nieur nuclĂ©aire qui confirme la rĂ©alitĂ© de lâaccident et son caractĂšre potentiellement dangereux ©
Pendant trois jours, les spĂ©cialistes craignent lâexplosion de la bulle dâhydrogĂšne. Les autoritĂ©s hĂ©sitent sur la nĂ©cessitĂ© dâune Ă©vacuation massive. Les informations donnĂ©es par lâexploitant de la centrale, par les journalistes et par les autoritĂ©s, sont contradictoires. A la suite dâĂ©changes tĂ©lĂ©phoniques confus avec des personnes mal informĂ©es de lâĂ©tat du rĂ©acteur, les officiels responsables conclurent que les 12 mSv mesurĂ©s au haut de la cheminĂ©e dus au relĂąchement de xĂ©non reprĂ©sentent la dose Ă laquelle la population pouvait ĂȘtre exposĂ©e et donc une menace.
Le gouverneur de Pennsylvanie dĂ©cida le samedi 30 mars dâĂ©vacuer les femmes enceintes et les enfants de moins de 2 ans dans un rayon de 8 km autour de la centrale. Dans un climat de panique, plus de 140 000 personnes fuirent la rĂ©gion au milieu dâembouteillages monstres.
Le soir du 30 mars, le reportage de Walter Cronkite, fit la Une des CBS Evening News. TrĂšs respectĂ© du public amĂ©ricain, le prĂ©sentateur vedette de la CBS, qui couvrit lâassassinat de Kennedy, Ă©tait trĂšs Ă©coutĂ©. Son sombre diagnostic « â âwe are faced with the remote but very real possibility of a nuclear meltdown at Three Mile Island atomic power plant.â marqua les esprits.
Selon ce cartoon, la chance est intervenue pour que lâacier de la cuve ne fonde pas Ă©vitant que des quantitĂ©s massives de radiations soient relĂąchĂ©es : un dispositif bon marchĂ© sur lequel les industriels auraient misĂ© depuis lâorigine du nuclĂ©aire ! Mais, bien que les dĂ©gĂąts subis par les Ă©lĂ©ments combustibles aient dĂ©passĂ© ceux imaginĂ©s dans leurs pires cauchemars par les ingĂ©nieurs de lâĂ©poque, ce sont les enceintes de confinement conçues par ces ingĂ©nieurs et non la chance, qui ont limitĂ© ces dĂ©gĂąts au site du rĂ©acteur. ©
Le 1er Avril, la « bulle », avec son risque dâexplosion, se dĂ©gonfla au propre et au figurĂ©. Le PrĂ©sident Jimmy Carter visita le site. Cela nâempĂȘcha pas bulle mĂ©diatique dâenfler et la tempĂȘte politique de faire rage, nourrie de confusion et de dĂ©sinformation. Douze jours aprĂšs lâaccident, le gouverneur dĂ©clara que tout danger Ă©tait Ă©cartĂ©. Des informations confuses et contradictoires rapportĂ©es par les mĂ©dias suscitĂšrent un dĂ©bat sur lâĂ©vacuation.
Des centaines de prĂ©lĂšvements de lâenvironnement furent effectuĂ©s autour de TMI durant la pĂ©riode de lâaccident par le DĂ©partement de lâEnergie (DOE) et dâautres agences. On nâobserva pas de niveaux anormaux, sauf pour les gaz nobles, et pratiquement pas dâiode (on nâeut pas besoin de distribuer Ă titre de prĂ©vention des pastilles dâiodure). Les valeurs des relevĂ©s se situaient bien en dessous des limites de sĂ©curitĂ©. La radioactivitĂ© relĂąchĂ©e Ă lâextĂ©rieur avait Ă©tĂ© minime.
RETOUR PAGEÂ Three Mile Island