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Confiner et enfouir quand attendre ne suffit plus

Laisser faire le temps devient inopérant quand la décroissance radioactive devient lente. Pour mettre hors d’atteinte le résidu de radioactivité qui subsistera dans des temps lointains, il reste la solution d’immobiliser les atomes radioactifs – qui ne prolifèrent pas – et d’interposer des écrans entre ces atomes et le monde du vivant.

Enfouir à grande profondeur
Galerie d’accès au site de Yucca Mountain dans le désert du Nevada aux USA. La construction de ce site de stockage souterrain qui aurait pu abriter les déchets accumulés des centrales américaines a été arrêtée en 2011 pour des raisons principalement politiques mais aussi techniques.
© DOE

Une feuille de papier arrête les particules alpha. Une paroi métallique de quelques millimètres suffit pour les électrons bêta, mais les rayons gamma demandent des épaisseurs d’écran beaucoup plus importantes. La « longueur d’atténuation », l’épaisseur d’écran nécessaire pour atténuer de moitié l’intensité des rayons gamma est d’une dizaine de centimètres pour l’eau. Elle tombe à 1 ou 2 cm avec un très bon absorbant comme le plomb. Des briques de plomb, quelques mètres de terre ou d’eau protègent efficacement des rayons gamma, et a fortiori des autres rayons.

On cherchera donc à confiner la radioactivité dans un colis, composé d’un matériau solide, appelé la matrice, capable d’incorporer des atomes radioactifs et d’empêcher leur migration. Ces atomes se comportent comme des atomes ordinaires tant qu’ils ne se désintègrent pas. Par contre, leurs désintégrations produisent de la chaleur et génèrent des dégâts au sein de la matrice. Il faut évacuer cette chaleur le temps nécessaire et choisir un matériau résistant aux radiations.

Piéger les atomes radioactifs dans du verre
Le schéma du haut montre la capacité d’une structure vitreuse, structure amorphe, à s’accommoder en temps normal de la présence d’une grande quantité d’espèces chimiques (silicium, bore, sodium, aluminium, oxygène, etc). Les verres spéciaux (à gauche), comme ceux utilisés à la Hague, sont conçus pour incorporer aussi la grande variété d’éléments présents dans le combustible usé. Les produits de fission et les actinides sont incorporés et forment des liens chimiques avec les composantes principales du verre qui les retiennent captifs.
© CEA/DCom

On entrepose les colis le temps que le dégagement de chaleur soit devenu raisonnable, en piscine ou à l’air libre, en surface ou à faible profondeur. Cela permet accessoirement de différer une décision quant à la destination ultime des colis et d’offrir la possibilité de se raviser si – les progrès des recherches aidant – de meilleures solutions étaient proposées.

Une fois les colis suffisamment refroidis, il est généralement envisagé de les enfouir à grande profondeur au sein d’ouvrages bétonnés. S’ils ne sont aidés par une éruption volcanique ou … la main de l’homme, des colis vitrifiés ne remonteront pas de 500 mètres sous terre par l’opération du Saint-Esprit ! On recherche donc des couches géologiques stables et à l’abri de l’eau.

L’eau est en effet le seul agent abondant à même de s’attaquer aux colis, de dissoudre les matières solubles et de faire remonter des éléments radioactifs en surface. Si la couche géologique est sèche et le colis conçu pour résister à l’eau, une éventuelle remontée sera lente et progressive, diluée dans le temps et dans l’espace.

Les recherches sur les couches géologiques et les colis ont pour objet de comprendre les mécanismes de ces remontées afin d’en réduire le risque. Elles ont déjà démontré la faisabilité du stockage. Il exista aussi des projets futuristes : des américains ont proposé des forages extrêmement profonds (bore holing) de plusieurs kilomètres sur le site même des centrales pour enfouir leurs déchets ; il a été question d’expédier des déchets dans l’espace, une solution trop risquée et coûteuse qui relève encore de la science fiction.