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Une série de mesures pour améliorer la sûreté des RBMK

Après l’accident, un certain nombre de réacteurs RBMK ont été arrêtés notamment ceux situés sur le site de Tchernobyl dont la dernière tranche a été fermée en 2000. Avec l’aide de la communauté internationale, de grands efforts ont été déployés pour améliorer les autres RBMK qui continuaient à produire de l’électricité en Russie et ailleurs.

Dans un premier temps, il s’agissait d’enrayer dans les meilleurs délais ou de réduire autant que possible, les défauts de conception les plus graves : ce sont les mesures post-Tchernobyl. Ensuite, on a procédé à des programmes de modernisation, destinés à revoir en profondeur les questions liées à la sûreté du fonctionnement de ces réacteurs : physique du cœur, systèmes de sûreté, systèmes de sauvegarde,

Salle de contrôle d’un RBMK en 1999
Salle de contrôle de l’unité 3 de Tchernobyl, unité jumelle de l’unité 4 accidentée. En 1999, treize ans après l’accident, elle avait déjà profité des « mesures post-Tchernobyl » et avait été considérablement modernisée. Les procédures d’exploitation avaient été revues et une culture de la sûreté mise en place
@ Wikimedia/ Source : Argonne National Laboratory

Les mesures post-Tchernobyl

Les mesures post-Tchernobyl ont été mises en œuvre immédiatement après l’accident afin de remédier dans l’urgence aux défauts de conception d’alors. Elles ont touché tous les réacteurs.

La principale mesure a été de combattre le « coefficient de vide positif », cette source d’instabilité à faible puissance dont l’effet fut d’amplifier les variations de réactivité du cœur lors de l’accident. Pour réduire l’effet déstabilisant de ce coefficient positif, un certain nombre de barres absorbantes fixes furent ajoutées dans le cœur des RBMK à la place d’éléments de combustibles et le degré d’enrichissement en uranium-235 fut augmenté en compensation. Sans rendre le coefficient de vide négatif, ces mesures ont contribué à le réduire significativement.

Les mesures suivantes visaient à améliorer le contrôle et en particulier le système d’arrêt d’urgence. Pour pallier à la chute très lente (18 sec) des barres absorbantes, on a installé un système d’arrêt rapide comportant 24 nouvelles barres pouvant être complètement insérées en 2 à 3 secondes. Les extrémités des barres absorbantes qui accélérait en début d’insertion les réactions de fission au lieu de les étouffer ont été corrigées. De nouveaux signaux d’alarmes ont été installés pour le déclenchement de l’arrêt d’urgence.

Le troisième train de mesures a consisté à améliorer la capacité de système de dépressurisation. Les RBMK ne possédant pas d’enceinte de confinement, celui-ci reposait sur la résistance des tubes de force. La rupture de quelques-uns de ces tubes avait été prévue, mais non celle d’un grand nombre comme cela s’est produit. Pour évacuer rapidement la pression en cas de situations accidentelles, un système de réduction de la pression par condensation de la vapeur a été installé.

Enfin avec l’aide internationale et en particulier celle de l’IRSN pour la France, les procédures d’exploitation ont été entièrement revues et une culture de la sûreté a été introduite. La culture de la sûreté existait bien dans l’ancienne Union Soviétique, mais elle passait parfois après les impératifs de production.

Réacteur RBMK d’Ignalina (Lituanie)
Grand hall du réacteur d’Ignalina en Lituanie, montrant le sommet des tubes de forces et à l’arrière plan la machine de chargement. La Lituanie possédait sur son territoire deux puissants réacteurs RBMK de 1500 MWe qui ont été arrêtés, malgré leur modernisation (le dernier fin 2009), du fait des exigences de l’Union Européenne. Ce petit pays, longtemps en tête du classement des nations pour la part d’électricité d’origine nucléaire, se trouve depuis entièrement dépendant de l’étranger pour son approvisionnement en électricité.
@DR

Un important programme de modernisation

La sûreté des RBMK a été très sensiblement relevée par les programmes de modernisation. A tel point que ces réacteurs peuvent être aujourd’hui favorablement comparés à leurs homologues occidentaux pour reprendre le vocabulaire d’avant 1986. Le réacteur d’Ignalina dont l’Union Européenne a exigé la fermeture pour prix de l’entrée de la Lituanie dans l’Europe a été davantage victime de préjugés à l’encontre des RBMK que de ses performances.

Il faut compter environ 4-5 ans pour la mise en œuvre complète de la modernisation d’une tranche. La modernisation implique des centaines d’améliorations de physique ou techniques : Réduction de l’instabilité dans le cœur, systèmes modernes et efficaces de contrôle, de refroidissement de secours, de détection de fuites, améliorations de la capacité de confinement, programmes d’inspection en service, assistance au pilotage etc … L’achèvement des programmes de modernisation des derniers réacteurs est prévu à l’horizon de 2012.

Le programme de modernisation a nécessité d’importantes ressources financières et humaines, et le concours d’experts internationaux. Le coût de la modernisation des RBMK a été estimé à ~ 200 -300 millions de dollars par tranche (~ 3-4 milliards au total). Cette somme est minime comparée au coût économique et humain de la catastrophe notamment avec l’évacuation de toute la population habitant dans un rayon de 30 km autour de la centrale. Selon des sources «officielles» (le chiffre est à considérer avec prudence), le coût de l’accident de Tchernobyl s’élèverait à ~ 175 milliards de dollars.

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