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La filière des réacteurs de Tchernobyl

La guerre froide et le rideau de fer ont conduit après 1947 au développement de filières séparées dans les pays occidentaux et en Union Soviétique. L’espionnage et les exploits des services secrets ont été loin de compenser le manque de contacts industriels !

Les réacteurs RBMK
Coupe simplifiée d’un réacteur RBMK de puissance 1000 MW. Chaque assemblage de combustible est contenu dans un tube de force à l’intérieur duquel circule le fluide de refroidissement. Les 1700 tubes de force sont placés verticalement dans un empilement de briques de graphite qui joue le rôle de modérateur. Au-dessus du réacteur, une machine de rechargement permet le déchargement et le chargement, en continu, du combustible dans les tubes de force. Lors de l’accident, les briques de graphite ont brûlé pendant 10 jours, prolongeant les rejets de radioactivité.
© IRSN

À la fin de la seconde guerre mondiale, les américains avaient développés des réacteurs à Hanford pour produire le plutonium de leurs bombes atomiques. Ces réacteurs furent abandonnés en Occident pour la production d’électricité, mais poursuivis en Russie. Les Soviétiques développèrent ainsi la filière RBMK, des réacteurs à uranium enrichi, dont la conception découle des premières piles atomiques. La filière RBMK est celle devenue tragiquement célèbre lors de l’accident de Tchernobyl.

Ces réacteurs sont modérés au graphite et refroidis à l’eau. Le combustible est de l’oxyde d’uranium enrichi de 2 à 2,6% en uranium-235. Le cœur est volumineux, 20 fois celui d’un réacteur REP. Pas de cuve sous pression, mais un grand nombre de tubes verticaux, appelés « tubes de force » contenant le combustible. Il n’y a pas d’enceinte de confinement. Le réacteur de Tchernobyl comportait 190 tonnes d’oxyde d’uranium enrichi répartis dans 1681 « tubes de force ».

Chaque tube de force renferme un assemblage combustible au dioxyde d’uranium autour duquel l’eau de refroidissement circule à une pression d’environ 70 atmosphères. L’eau joue le rôle de réfrigérant et fournit la vapeur directement utilisée pour actionner les turbines (il n’y a pas de générateur de vapeur). Le chargement et le déchargement du combustible se font en continu, sans qu’il soit besoin d’arrêter le réacteur.

L’ensemble des caractéristiques du réacteur (eau bouillante, graphite comme modérateur, combustible légèrement enrichi, absorbants, etc …) confère à ce réacteur une instabilité à certains régimes de fonctionnement qu’il convient d’éviter, notamment aux faibles puissances. Le coefficient de température y devient positif. Un coefficient de température positif signifie qu’une augmentation de température engendre une nouvelle augmentation de la température et ainsi de suite. La perturbation initiale se trouve ainsi amplifiée. Cet effet déstabilisant rend alors difficile le contrôle du réacteur. Pour le combattre, on joue sur les barres de contrôle. Depuis l’accident de 1986, les exploitants des réacteurs ont augmenté le nombre de barres de contrôle dans le cœur et amélioré la vitesse d’insertion de ces barres qui était trop lente.

Cette fragilité de fonctionnement a contribué à l’accident de Tchernobyl, mais n’en est pas la raison première. Les réacteurs RBMK disposaient de systèmes de sécurité qui auraient pu jouer leur rôle, s’ils n’avaient été volontairement désactivés pour procéder à des essais.

Au moment de l’accident de Tchernobyl, le parc des RBMK comptait 16 réacteurs en exploitation. A la suite de l’accident, entre 1991 et 2000, tous les réacteurs de Tchernobyl ont été définitivement arrêtés. Les deux réacteurs de1500 MWe d’Ignalina en Lituanie ont été aussi fermés (le dernier fin décembre 2009), leur fermeture ayant été exigée pour l’entrée de ce pays dans l’Union Européenne. Aujourd’hui, il reste 11 réacteurs RBMK de 1 GWe , en exploitation, 4 à la centrale de Leningrad, 3 à la centrale de Smolensk et 4 à la centrale de Koursk.

Centrale RBMK de Smolensk
Salle des turbines de la centrale de Smolensk. Les 3 unités de la centrale de Smolensk font partie des 11 unités RBMK, encore en service en Russie, qui ont été considérablement modernisées depuis l’époque de Tchernobyl. Leur sécurité notamment a été entièrement revue. Sur la base de ces améliorations, l’exploitation des RBMK a été prolongée.
© M.Chouha

 

Les 11 unités russes ont fait l’objet d’un important programme de modernisation destiné à améliorer leur sûreté. Presque tous ces réacteurs en ont bénéficié, les deux derniers devant l’être en 2010. Du fait de ces améliorations, le niveau de sûreté des RBMK s’est trouvé très sensiblement relevé. Leur exploitation devrait encore durer une quinzaine d’années, jusque vers 2035. La tranche N°3 de la centrale de Smolensk, équipée du dernier RBMK-1000 mis en service en 1990, devrait être exploitée jusqu’en 2034.

DÉFAUTS DES RBMK ET AMÉLIORATIONS POSTÉRIEURES A TCHERNOBYL

– 1) : Défauts de conception (RBMK) à Tchernobyl
– 2) : Mesures pour améliorer la sûreté des RBMK