Fukushima : eaux radioactives
Des eaux radioactives envahissantes sur le site de la centrale
La présence de grandes quantités d’eaux très radioactives sur le site de la centrale quelques jours après l’accident de Fukushima a constitué une complication majeure. Cette complication, conséquence des techniques employées pour refroidir d’urgence les réacteurs, constitua durant plusieurs mois le principal obstacle au retour à la normale. Les liquidateurs japonais durent faire face à des difficultés d’un genre nouveau rencontrées ni à Tchernobyl ni à Three Mile Island.
Ce sont les problèmes de refroidissement qui furent à l’origine du rejet de grandes quantités d’eau très contaminée sur le site de la centrale. En temps ordinaire un circuit en boucle refroidit le cœur des réacteurs, mais la détérioration du circuit et de son alimentation électrique amenèrent à injecter de grandes quantités d’eau dans les cuves en circuit ouvert. Au contact des gaines de combustible endommagées cette eau s’est chargée de radioéléments solubles dont l’iode-131 et le césium. Elle est devenue très radioactive.
L’eau injectée s’étant retrouvée dans les enceintes de confinement inonda divers bâtiments de la centrale du fait de fuites et de vannes non alimentées en électricité. Toutefois, une fraction importante de l’iode et du césium radioactifs se retrouva dissoute et donc piégée aux abords de la centrale, réduisant de ce fait la contamination de l’atmosphère et l’exposition des populations.
Des flaques d’eau très radioactives dans le hall des turbines compliquèrent et retardèrent fin mars 2011 les interventions, obligeant de recourir à des robots ! Pire, début avril, une partie de l’eau très contaminée provenant du réacteur N°2 s’échappa dans une fosse en communication avec la mer. La brèche par laquelle s’échappait cette eau à un rythme estimé à sept tonnes par heure durant plusieurs jours fut colmatée le 5 avril 2011.
Ce déversement d’eaux très radioactives a laissé des traces. Une partie de cette eau piégée sous forme de poches dans des conduits autour des bâtiments des réacteurs fit son chemin. En juin 2013, un niveau de radioactivité très élevé fut mesuré dans une tranchée située entre les réacteurs et la mer.
Premières décontaminations des eaux radioactives
Etant donné le volume à traiter, alors évalué à 100 000 tonnes, il fallut installer une première station d’épuration à même de filtrer, de décontaminer cette eau et d’en conditionner les résidus radioactifs. Une technique mise en œuvre.pour le traitement des effluents radioactifs dans les installations de Marcoule et La Hague fut d’abord utilisée.
Cette station d’épuration à gros débit mise en service le 11 juin 2011 grâce au concours d’AREVA et de la société américaine Kurion, avec une capacité de traitement de 1000 tonnes par jour, constitua une étape dans la reprise en main des installations. Les opérations de déblaiement, de nettoyage et de réparation pouvaient dès lors se dérouler normalement. L’eau débarrassée non seulement de l’essentiel de sa radioactivité (celle du césium) mais aussi de son sel, pouvait être réinjectée en circuit fermé dans les réacteurs. Convenablement refroidis, les températures des fonds de cuve des réacteurs N°1, N°2, N°3 descendirent ainsi en dessous des 100°C.
SARRY (simplified active water retrieval and recovery system), une seconde installation de décontamination du césium, fut ensuite mise en service. Ces installations furent complétées par un troisième système de décontamination – ALPS – à même de décontaminer l’eau de radioéléments autres que le césium, à partir de novembre 2013, portant la capacité de traitement à 3 fois 250 m3/jour.
2013 : Problème de l’accumulation des eaux radioactives à stocker
Par ailleurs, un flux important d’eaux de la nappe phréatique passe sous la centrale. Ces eaux souterraines inondant les sous-sols se contaminaient en se mélangeant avec des eaux radioactives ayant servi au refroidissement des réacteurs car les circuits n’étaient plus étanches. L’eau présente dans les soubassements devaient être pompées pour passer dans les installations de décontamination, une partie étant réinjectée dans les circuits de refroidissement. La décontamination n’étant pas complète, le surplus ne pouvait être rejeté. Il fallut entreposer de ce fait un apport quotidien de 400 m3 d’eaux partiellement contaminées et construire pour y faire face un très grand nombre de citernes-réservoirs.
L’accumulation d’eaux radioactives à stocker sur le site de la centrale devint un problème majeur deux ans après l’accident. A la mi 2013, le volume à stocker dans un très grand nombre de citernes atteignait 300 000 m3. La limite des capacités de stockage sur place était presque atteinte. La présence d’une telle accumulation était par elle-même source de dangers. Ainsi, au mois d’août une fuite grave survenue dans une citerne fut à l’origine d’un incident de niveau 3 de l’échelle INES.
Trois ans après 2011, un système complet de traitement des eaux était en place. Différents procédés de décontamination particulièrement efficaces traitent entre 1 300 et 2 000 m3 par jour. Aujourd’hui, plus de 90 % majeure partie de l’eau stockée dans les réservoirs a été traitée. Parallèlement, les réservoirs de moins bonne qualité, installés en urgence dans les premières années, et présentant des risques de fuites, ont été remplacés par des réservoirs soudés bien étanches.
Conservées sur le site, il y avait au début 2017 près d’un million de m3 d’eau stockée dans 1 300 réservoirs. L’autorité de sûreté japonaise n’avait pas encore autorisé à cette date le rejet en mer de ces eaux épurées.
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