LARADIOACTIVITE.COM

Une base de connaissances grand public créée et alimentée par la communauté des physiciennes et physiciens.

Les facteurs qui ont atténué l’accident

Mitiger : le mot est d’origine anglo-saxonne. Il signifie içi adoucir, atténuer ses conséquences.

Il semble paradoxal d’évoquer les facteurs qui ont atténué l’accident de Fukushima, mais ils sont bien réels. Certains relèvent du hasard, d’autres de dispositions prises.

Les accidents de Fukushima et de Tchernobyl ont tous deux été classés au niveau maximum de l’échelle INES, le niveau 7 : “rejets majeurs hors du site, avec des effets étendus sur l’environnement et sur la santé“. Ce classement commun rend mal compte de différences majeures

Malgré la perte de trois réacteurs, quatre principaux facteurs ont contribué à atténuer les conséquences de l’accident japonais pour l’environnement et surtout les populations : le rôle protecteur des enceintes de confinement ; des délais suffisants pour les mises à l’abri ; le piégage d’une partie des rejets radioactifs ; enfin le hasard de vents favorables.

Les gros rejets radioactifs surviennent à partir du quatrième jour
Ces débits ambiants de radioactivité ont été mesurés du 11 au 17 mars en divers emplacements de la centrale. Leur chronologie est instructive. Les dépressurisations précèdent les dénoyages avec dégagements d’hydrogène, les explosions et les gros rejets de radioactivité (principalement le réacteur 2). Les dépressurisations avant le dénoyage sont anodines. Les gros rejets vers l’intérieur des terres surviennent près de 4 jours après le tsunami.
© Source B.Barré

1) La protection des enceintes de confinement . Les enceintes de confinement dont étaient dotés les réacteurs de Fukushima contrairement à celui de Tchernobyl ont adouci les conséquences de l’accident même si elles ont joué imparfaitement leur rôle. A Tchernobyl, le réacteur s’est retrouvé à l’air libre avant qu’un violent incendie ne propage durant huit jours des particules radioactives dans l’atmosphère. A Fukushima, le combustible nucléaire est resté dans les cuves et les enceintes. Seuls des radioéléments volatils se sont échappés.

2) Un long délai pour les mises à l’abri. Les presque quatre jours écoulés entre le tsunami et les premiers rejets radioactifs importants vers la terre ont donné le temps aux autorités japonaises de mettre à l’abri les populations les plus exposées. Pour les 78 200 habitants de la zone des 20 km autour de la centrale, évacués d’urgence entre le 12 et le 15 mars, l’exposition aux dépôts survenus essentiellement après le15, a été très faible.

3) Piégeage d’une partie des rejets radioactifs. Quelques 100 000 tonnes d’eaux radioactives se sont accumulées dans les bâtiments. Ces eaux radioactives ont été une malédiction pour la reprise en main de la centrale. Une partie s’est déversée jusqu’au 5 avril dans la baie de Fukushima. Jusqu’au mois de juin où ces eaux ont commencé à être décontaminées, elles ont empêché l’accès aux abords. Mais ces eaux ont dissous une bonne partie de l’iode et du césium radioactif qui ne s’est pas retrouvée dans l’environnement. L’iode resté sur place a disparu du fait de sa décroissance radioactive. Le césium a été récupéré lors des opérations de décontamination.

Rétention partielle de la radioactivité
Ce schéma de l’exploitant TEPCO montre le rôle des enceintes de confinement et des eaux radioactives restées sur le site dans la rétention de la radioactivité. Le gros du combustible nucléaire fondu serait tombé au fond de la cuve et sans doute de l’enceinte de confinement. Les eaux radioactives sont décontaminées pour être réinjectées dans la cuve et l’enceinte. L’ajout d’acide borique a pour but d’inhiber les réactions de fissions.
Source : Japan Atomic Industrial Forum, Tepco

 

4) Des vents favorables : C’est le facteur chance ! Durant la période des rejets, les vents ont soufflé la majorité du temps vers la mer. Les nuages ont déposé au gré des vents et des pluies les atomes radioactifs sur les immenses étendues du Pacifique : une bénédiction pour les humains !

Pour les habitants des mers, les lois de la géométrie et de la dilution ont atténué les conséquences ! La différence entre un dépôt de radioactivité au sol et en mer tient à ce que le dépôt se fait sur une surface dans le premier cas et dans un volume dans le second. La concentration de radioactivité de l’herbe que broutera une vache sera supérieure à celle diluée de l’eau que boira un poisson. En haute mer la concentration devient négligable. L’eau constituant un écran efficace et le parcours des gamma étant de l’ordre du mètre, ll n’y a pratiquement plus d’exposition externe.

A titre d’exemple, supposons que le césium absorbé par le milieu marin (voir la page Pollution marine) se soit retrouvé dilué dans un volume de 500 000 km2 (surface de la France) et de 100 m de profondeur. Ce volume qui parait grand représente une part modeste de l’eau du Pacifique. Dans ce cas, la radioactivité s’élèverait à 0,5 becquerel par litre : une quantité minime par rapport à la nuisance des nappes de déchets plastiques et nappes de pétrole dérivant dans les océans !