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Une crise qui dure et un avenir incertain

Stagnation des négociations
Malgré l’ouverture américaine, les perspectives de compromis se sont éloignées après la réélection pour 4 ans le 13 juin 2009 du président Ahmadinejad et les émeutes de Téhéran. Le président, qui affirma une fois à l’ONU que le dossier nucléaire iranien était clos, ignore le compromis. Symbole de cette rigidité, on voit ici (à droite) lors de son entrée en fonction le 23 octobre 2007, Saeed Jalili le négociateur iranien nommé par M Ahmadinejad en compagnie de Javier Solana le responsable de la politique étrangère européenne et de son prédécesseur, le pragmatique Ali Larijani.
© DR

Le question du nucléaire est passée un temps au second plan dans la tourmente qui a secoué l’Iran en juin 2009 et qui a occulté la main tendue du Président Obama et l’offre d’un dialogue direct avec la république islamique. La réponse des autorités – des actions pas seulement des paroles – a été confuse, mais surtout elle a été emportée par le tumulte qui a suivi la réélection contestée le 13 juin 2009 du président ultra-conservateur Mahmoud Ahmadinejad.

Interrogé pendant le bref instant de liberté de la campagne électorale, le candidat réformateur Mir Hossein Moussavi a lui aussi réaffirmé le droit de son pays au nucléaire civil, ajoutant qu’il offrirait « toute la transparence et les contrôles possibles garantissant que ces activités nucléaires ne sont pas détournées de leur destination ».

L’Histoire est restee en suspens ! Qui l’emporterait ? de la politique d’ouverture et du poing desserré du parti réformateur, ou celle du poing fermé et du repli dans un bunker qui semble être le choix du président Ahmadinejad et du guide suprême Ali Khameini.

Démission du patron du nucléaire iranien
Après douze ans de bons et loyaux services, le patron du nucléaire iranien Gholamreza Aghazadeh a présenté sa démission le 16 juillet 2009 pour des raisons probablement liées aux évènements . On l’aperçoit ici en mars 2008, contemplant à l’usine de Natanz, un emplacement pour des rangs de centrifugeuses. Ce modéré respecté et compétent, proche du candidat réformateur Mir Hossein Moussavi. avait paraphé le protocole additionnel du Traité de Non Prolifération autorisant l’AIEA à mener des inspections «renforcées et inopinées».
©  Reuters/New York Times

La perspective de 4 nouvelles années de présidence Ahmadinejad augure mal d’un compromis., La nouvelle Secrétaire d’Etat Hillary Clinton semble plus encline à la manière forte qu’à la main tendue.. A la tête de l’AIEA et de la diplomatie européenne, deux hommes de dialogue, Mohammed El Baradei et Javier Solana quittèrent leurs fonctions dans l’année.

Etat des lieux des activités nucléaires

Durant les deux années, le dossier a peu évolué à la fois en raison des évènements survenus à Téhéran, de la rigidité des deux parties et d’un grand manque de confiance réciproque..

Du temps d’Ali Larijani, l’ancien négociateur iranien qui préférerait « les parties d’échec aux matchs de boxe », quelques compromis avaient été trouvés. Son successeur Saeed Jalilli, un proche Guide Suprême Ali Khamenei, entend « négocier avec force ». Ancien combattant de la guerre Iran-Irak, il en a été victime (il y a perdu une jambe) et n’est pas sensible au compromis. Son manque de souplesse évoque, pour ceux qui ont connu, l’inaltérable Viacheslav Molotov, le monsieur niet de la diplomatie soviétique de la guerre froide.

Nouvelles accusations. Des documents électroniques fournis à l’AIEA par certains états membres occidentaux accusent début 2008 l’Iran d’études présumées à caractère militaire. Ces études concernaient un système d’explosifs à implosion entrant dans la conception classique d’une bombe atomique ; la description d’un dispositif d’essais souterrains ; des études de configuration du corps de rentrée d’un missile permettant d’y loger éventuellement une ogive nucléaire. Après avoir mis en doute l’authenticité des documents et s’être plaint de n’avoir pas eu accès aux originaux, l’Iran a admis que certaines informations étaient exactes mais que les activités concernaient des applications civiles et militaires conventionnelles. Il n’a plus été question pendant des mois de ces documents jusqu’au moment où ces accusations ont refait surface en août 2009.

Enrichissement de l’uranium : franchissement d’un seuil.. Cœur du conflit, l’activité d’enrichissement, qui relève selon l’Iran de son droit, n’a pas été suspendue malgré les sanctions des puissances occidentales. Mais au lieu des 54 000 centrifugeuses promises en 2006 par le président, seulement 8 000 étaient opérationnelles fin août 2009, dont un peu plus de 4000 en fonctionnement. Selon l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) indique, l’Iran semblait avoir ralenti sa production d’uranium faiblement enrichi mais continuait d’installer des centrifugeuses sur son site de Natanz.

Ce décalage entre désir et réalité tient à ce que l’enrichissement est une technique extrêmement difficile dont les difficultés sont accrues du fait des divers embargos. Au printemps 2009, les centrifugeuses avaient produit 1,2 tonne d’uranium enrichi à 4 % (sous contrôle de l’AIEA) à comparer aux 1200 tonnes annuelles qui sortent des usines de Tricastin pour alimenter les 60 réacteurs français.

Livrés à eux mêmes, les ingénieurs iraniens ont réalisé malgré ce modeste tonnage un prouesse technique et franchi un seuil : Ils ont acquis le savoir faire de l’enrichissement. En enrichissant à nouveau cette 1,2 tonne à 4 %, ils pourraient obtenir 50 kg d’uranium contenant 95 % d’isotope 235, de quoi fabriquer en théorie une bombe atomique dont la masse critique est de quelques dizaines de kilos d’uranium-235.

Réacteur de Busher. La mise en service du réacteur de Busher est à nouveau retardée. Après un essai à vide au début 2009, il pourrait être connecté au réseau dans le courant de 2010.

Réacteur d’Arak. Dans un geste qui se voulait de détente, les inspecteurs de l’AIEA ont été autorisés à visiter le site de ce réacteur à eau lourde en construction, en principe destiné en principe à la production d’isotopes, site dont ils réclamaient l’accès depuis 2007.

21 Septembre 2009 : une usine d’enrichissement à Qom. L’AIEA fait part d’un courrier l’informant de la construction d’une seconde usine pilote d’enrichissement près de la ville sainte de Qom. Cette nouvelle tombe alors que les pays occidentaux réfléchissent à d’éventuelles nouvelles sanctions. Comme toujours l’attitude de l’Iran, accusé de dissimulation, est ambigue. La construction d’une seconde usine d’enrichissement dont on voit mal l’intérêt suscite de nombreux doutes. Il se peut que les installations de Natanz étant régulièrement menacées de bombardements, les autorités iraniennes aient voulu disposer d’une installation de secours en cas de destruction. Une première inspection de l’AIEA, fin octobre 2009. a montré que la construction avait dépassé le stade du génie civil mais n’avait pas atteint celui d’installations de centrifugeuses.

Octobre 2009 : Reprises de discussions et réacteur de recherches de Téhéran : Suite à une offre de dialogue iranienne, l’administration Obama accepte pour la première fois d’ouvrir des discussions directes. Ces négotiations ont été marquées par une légère avancée : l’Iran acceptait de faire sortir du pays 1 tonne de son uranium controversé de Natanz pour qu’il soit transformé en combustible pour les besoins d’un réacteur qui produit des isotopes pour la médecine, à Téhéran mais sous contrôle de l’AIEA.

Mais en raison de l’abîme de méfiance séparant les parties, le projet semble avoir échoué au printemps 2010 : les occidentaux exigent que l’Iran livre sa tonne d’uranium d’abord ; l’Iran, gouvernement et opposition confondus, craignant que cette tonne soit subtilisée demandent que l’échange se fasse par tranches. Américains, français et anglais plaident pour des sanctions qui mordent, Russie et surtout Chine trainent les pieds.

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