Sous criticité
Un régime permis par un appoint des neutrons
Les réacteurs hybrides bénéficient d’un appoint de permanent de neutrons, les neutrons de spallation. Ils peuvent se permettre d’être sous-critiques, un grand avantage en termes de sûreté.
Il est utile de revenir sur la notion de criticité. La criticité k représente le nombre de fissions secondaires déclenchées par une fission primaire. Dans un réacteur sous-critique k est inférieur à 1, alors que pour des réacteurs classiques la criticité est juste égale à 1. Ces réacteurs sont dits critiques, car chaque fission initiale conduit, de génération en génération, à un nombre infini de fissions sans toutefois que le rythme de ces fissions ne prenne un tour explosif : tout l’art du pilotage de ces réacteurs consiste à maintenir ce rythme constant.
Dans un réacteur hybride au contraire, on fonctionne dans un régime où la criticité est légèrement inférieure à l’unité : k=0,98 par exemple. Ce choix offre un bon compromis entre une production d’énergie importante, grâce à l’amplification du nombre de fissions, et une sécurité accrue.
L’écart 1 – k représente le chemin à parcourir pour atteindre le régime où la réaction en chaîne s’entretient indéfiniment. Dans un réacteur classique où cet écart est nul, une réaction de fission initiale est à l’origine d’un nombre pratiquement infini de fissions.
Dans un réacteur piloté par un accélérateur (ADS), où l’on renonce à l’auto entretien de la réaction en chaîne en raison d’un appoint de neutrons, celle-ci continue néanmoins à multiplier par un facteur substantiel le nombre de fissions et donc le dégagement d’énergie. Cette multiplication est d’autant plus importante que l’écart de criticité est voisin de 0 : par exemple pour k=0.98, chaque fission initiale engendrera au total 50 fissions, dégageant chacune 200 MeV d’énergie.
L’écart entre la valeur 1 et la criticité k représente également la marge de sécurité d’un réacteur hybride. Dans un réacteur critique, où cette marge est nulle, on table pour le contrôle sur l’existence de neutrons produits avec un retard de l’ordre de la minute qui donnent le temps d’actionner des barres de contrôle absorbantes. Cette fraction des neutrons retardés est une mesure de la marge de sécurité. Inférieure au pourcent, elle est environ de 0,65 % pour un REP et de 0,4 % pour un réacteur rapide comme SuperPhenix.
La marge de sécurité d’un ADS qui n’est pas tributaire de neutrons retardés est beaucoup plus confortable. Elle est par exemple de 2 %, 3 à 5 fois plus importante, pour une criticité de 98%. Les variations de criticité étant lentes, cette marge offre une sécurité intrinsèque qui n’existe pas dans les réacteurs classiques : c’est l’intensité du faisceau de protons qui détermine la puissance produite, l’arrêt de ce faisceau impliquant l’arrêt du système.
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