LARADIOACTIVITE.COM

Une base de connaissances grand public créée et alimentée par la communauté des physiciennes et physiciens.

Axe 1 : Transmuter ou transformer les atomes radioactifs

La transmutation constitue le second volet des lois Bataille et de 2006. Elle est la suite naturelle du volet de la séparation. On cherchera à transmuter des actinides mineurs comme le neptunium, l’américium et le curium qui contribuent le plus à la toxicité radioactive des déchets sur le long terme, ainsi que éventuellement des produits de fission à vie longue comme le technétium.

La transmutation, contrairement aux “axes” de la séparation, du stockage, du conditionnement et de l’entreposage qui ont recours à des techniques industrielles éprouvées est une technique beaucoup plus délicate et difficile car elle s’attaque au noyau de l’atome. C’est une technique nucléaire. On transmute atome par atome et il y a beaucoup d’atomes à transmuter 8

La transmutation consiste à transformer la nature des noyaux atomiques au moyen de réactions nucléaires provoquées par des neutrons, réactions de fission ou simples captures neutroniques. C’est ainsi qu’une partie de l’urenium présent dans le coeur d’un réacteur est transformé en produits de fissuin ou, par captures successives de neutrons, en plutonium et actinides mineurs.

Le réacteur PHENIX : un outil pour la transmutation
Implanté sur les bords du Rhône sur le site nucléaire de Marcoule dans le Gard, PHENIX était un prototype de réacteurs à neutrons rapides refroidis au sodium, un type rare de réacteurs. C’est le principal outil dont a disposé la France pour mener les études sur la transmutation. Mis en fonctionnement en 1973, il a été remis à niveau en 1998 après l’arrêt de SUPERPHENIX pour procéder à ces études jusqu’à octobre 2009, date de son arrêt.
© A.Gonin/CEA

Une technique difficile aux rendements faibles

Le principe, séduisant, consiste à détruire les radioéléments à vie longue préalablement séparés en les transformant en radioéléments stables ou à vie courte ou moyenne. Séduisante sur le papier, la transmutation est difficile dans la pratique. Rappelons que seulement 5% de l’uranium présent dans un réacteur est transmuté au bout de 3 ans !

Pour augmenter ce faible rendement, il faut que l’énergie des neutrons soit telle que leur probabilité d’interagir, appelée section efficace, soit la plus élevée possible et que les flux de neutrons soient importants. Pour la transmutation, on recherchera donc des réacteurs spécialisés à neutrons rapides et à flux élevés, car les neutrons rapides sont les mieux à même de fissionner les actinides mineurs.

Les éléments transmutables sont transformés par capture de neutrons suivies ou non de fission. La fission, qui casse les actinides en des fragments stables ou à vie plus courte, fournit des neutrons. Au contraire, la transformation des produits de fission consomme des neutrons.

Pour transmuter efficacement, il faut des flux de neutrons élevés. Les radioéléments à transmuter seraient introduits dans le combustible des réacteurs sous forme d’une cible ou dilués d’une manière homogène dans le combustible.

Il existe deux voies de transmutations, la première par des réacteurs à neutrons rapides – les réacteurs conventionnels étant peu efficaces -, la seconde avec des réacteurs hybrides pilotés par un accélérateur (ADS). Bénéficiant d’un appoint de neutrons, ces derniers peuvent en principe brûler n’importe quel déchet, y compris les produits de fission à vie longue.

La loi française considère la transmutation comme l’objectif ultime pour la gestion des déchets : un objectif qui fait rêver mais qui sera difficile à atteindre. Les réacteurs adaptés n’existent pas encore. Le principal outil dont a disposé la France a été PHENIX, un réacteur à neutrons rapides assez ancien remis à niveau en 1998 mais arrêté en 2009. Depuis l’arret de PHENIX, les chercheurs français ne disposent plus de moyens expérimentaux dans l’hexagone. Il leur faut recourir à des centres étrangers, en attendant les possibilités qui seront offertes après 2020 par le démonstrateur de réacteur à neutrons rapides ASTRID.

Transmutation : l’option des réacteurs hybrides ou ADS
En parallèle à sa participation au programme des futurs réacteurs de génération IV à neutrons rapides, la France participe à l’étude de réacteurs hybrides capables de transmuter les actinides et produits de fission à vie longue et donc de réduire leur radiotoxicité. Ces réacteurs associeraient un accélérateur de particules qui offrirait une source continue de neutrons et un réacteur sous-critique qui multiplierait ces neutrons pour transmuter les radionucléides gênants.
© CEA

La transmutation de certains actinides mineurs, comme l’américium et le neptunium, a été démontrée sur le plan scientifique. Par contre, la transmutation du curium, très radioactif, difficile à manipuler, continue de poser de gros problèmes.

Selon la Commission Nationale d’Évaluation (CNE), la faisabilité de la fabrication de matériaux nucléaires propres à la transmutation à grande échelle d’actinides mineurs n’est pas non plus démontrée. Un rapport du CEA identifie les difficultés à surmonter au préalable et nombre d’essais sont en cours ou en attente. La faisabilité de certaines filières de quatrième génération ou des ADS en dépend. Les difficultés liées à l’incorporation de curium dans des matériaux nucléaires demeurent non résolues.

Les premiers démonstrateurs des réacteurs de Génération IV et des ADS consacrés à la transmutation sont attendus dans les années 2020-2030. Une coopération internationale très active, impliquant la Russie, le Japon, les États-Unis et de nombreux pays européens, s’est mise en place. Compte tenu des délais de mise au point de ces installations et des vérifications à effectuer, la transmutation à l’échelle industrielle d’actinides mineurs est envisageable au mieux en 2040.

AXE 1 : RÉSULTATS ET PERSPECTIVES SUR LA TRANSMUTATION
– 1) : Transmutation : perspectives