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Des noyaux lourds radioactifs au delà de l’uranium

A côté des produits de fission, d’autres éléments contribuent à la radioactivité du cœur des centrales nucléaires : ce sont les « actinides » . Ces noyaux « transuraniens », plus lourds que l’uranium, sont générés par ces captures de neutrons ,- dites radiatives – qui ne sont pas suivies de fissions. Les actinides tirent leur nom de l’actinium (Z=89), un métal lourd qui précède de peu l’uranium dans la table de Mendeleïev car ils possèdent des propriétés chimiques voisines. L’uranium, qui existe à l’état naturel, est aussi un actinide.

Glenn Seaborg
Glenn Seaborg, découvreur du plutonium et de nombreux éléments chimiques transuraniens a été le seul chercheur dont le nom a été attribué de son vivant à un élément chimique, le Seaborgium. On le voit ici, lors d’une conférence donnée à l’Université d’Orsay, retraçant les captures de neutrons permettant de fabriquer les premiers transuraniens ou actinides. Le seaborgium est situé beaucoup plus loin avec 106 protons, 14 de plus que l’uranium. Glenn Seaborg reçut le prix Nobel de chimie en 1951.
© H.Metivier

L’actinide produit le plus abondamment est le plutonium avec en tête son principal isotope le plutonium-239. Les réacteurs génèrent aussi en quantité moindre, d’autres actinides qui sont appelés « mineurs » pour cette raison. Les principaux sont le neptunium-237, les américium-241 et 243 et les curium-244 et 245.

La production d’actinides mineurs est faible par rapport à celle des produits de fission et du plutonium. Le combustible usé d’un gros réacteur à eau pressurisée de 1,3 gigawatt électrique contient en décharge annuelle : 33 tonnes d’uranium enrichi à 0,9 %, 360 kg de plutonium, 1,2 tonnes de produits de fission et 27 kg d’actinides mineurs. Parmi ces 27 kg, on retrouve 14 kg de neptunium, 12 kg d’américium et 1 kg de curium.

La radioactivité du plutonium et des actinides mineurs est petite, en sortie de réacteur, par rapport à celle des produits de fission. Pourquoi s’en préoccuper ? La première raison est que les actinides possèdent une durée de vie longues contrairement à la majorité des produits de fission. Ces durées de vie posent un problème pour le stockage à long terme des déchets radioactifs. La seconde raison est que ces noyaux lourds sont également des émetteurs alpha, plus radiotoxiques en cas d’ingestion que les produits de fission qui émettent des électrons bêta.

Cette radiotoxicité “en puissance” ne constitue pas toutefois un danger direct. Comme l’arsenic que Marie Besnard servait à ses proches dans les années 1950, le plutonium et les actinides mineurs doivent arriver dans nos estomacs et nos poumons pour donner libre cours à leur nuisance. Heureusement, ces éléments peu mobiles dans l’environnement, ont le plus grand mal à le faire. De plus, ils sont généralement conditionnés sous forme d’oxydes insolubles.

Au bout d’environ deux cents ans, l’activité et la toxicité potentielle des actinides l’emportent sur celles des produits de fission qui en voie de disparaître. C’est la raison pour laquelle la gestion des déchets radioactifs se préoccupe du devenir du plutonium et des actinides mineurs afin de laisser un environnement propre ‘aux générations futures’. Un des avantages du retraitement des combustibles usés est de pouvoir conditionner ces actinides dans des milieux qui les emprisonneront efficacement pour des millénaires comme du verre ou des céramiques avant de les mettre à l’abri dans des couches géologiques profondes.

Il est possible d’aller plus loin, en les faisant disparaître par transmutation ou mieux encore en ne les générant pas. Les combustibles à base de thorium présentent l’avantage de ne pas produire d’actinides, un avantage mis en avant par les promoteurs de cette filière.

SUITE : Isotopes du plutonium, actinides mineurs