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Une face d’ombre, une face de lumière …

Matériau sensible, recherché et redouté, le plutonium présente, comme le dieu romain Janus, une face de lumière et une face d’ombre. Ses remarquables qualités énergétiques (la face de lumière) en font à la fois un combustible nucléaire de premier choix et l’explosif privilégié de l’arme atomique (la face sombre). A la crainte des applications militaires s’ajoute celle d’avoir à enfouir, en tant que déchet, un élément connu pour sa toxicité radioactive.

C’est pour utiliser son potentiel énergétique, que le plutonium est extrait lors du retraitement des combustibles usés des réacteurs. Il est ensuite incorporé dans un combustible mixte, le MOX, puis retourne en réacteur. En France, seul le plutonium nécessaire pour alimenter les réacteurs brûlant du MOX est séparé, pour être recyclé. On évite ainsi d’avoir à stocker du plutonium sur « étagères ». Après son recyclage en réacteur, le combustible MOX usé contient encore du plutonium. Ces assemblages de combustible MOX usés très radioactifs sont entreposés en piscine dans des sites protégés. Pour réduire la quantité de plutonium accumulée des réacteurs à neutrons rapides seraient nécessaires.

Réutilisation du plutonium pour du combustible MOX
Le plutonium issu du retraitement du combustible usé est réutilisé en France pour fabriquer un nouveau combustible à base d’uranium et de plutonium, le MOX. La photographie montre à gauche le carrousel des boites de plutonium utilisées pour cette fabrication. Le plutonium est réparti en boites pour éviter le risque de criticité. A droite, assemblage MOX fabriqué dans l’usine Melox d’AREVA près de Bagnols-sur-Cèze, en France. Les assemblages contenant du plutonium sont beaucoup plus radioactifs que ceux à base uniquement d’uranium.
© AREVA

Réduire l’accès au plutonium de qualité militaire

Réduire l’accès au plutonium de qualité militaire reste l’un des objectifs majeurs de la non-prolifération nucléaire. Une bombe atomique demande heureusement une proportion en isotopes fissiles dépassant 90 %, supérieure aux 60 % du plutonium civil. Pour purifier ce plutonium, il faudrait recourir à des technologies coûteuses et avancées au-dessus des moyens d’états voyous ou de trafiquants.

Les réacteurs les plus répandus à eau pressurisée (REP) ou à eau bouillante (REB) sont peu proliférants. En fonctionnement, le seul moment où le plutonium possède la qualité militaire est quand le combustible est encore neuf et que l’isotope 239 fissile s’est accumulé avant que la plutonium-240 stérile se soit formé. Le plutonium prélevé, 3 ou 4 ans plus tard, au moment de la décharge du combustible contient environ 60 % d’isotopes fissiles et 40% de non fissiles.

Les réacteurs les plus proliférants sont ceux dont on peut extraire en début de charge le combustible irradié, comme dans certains réacteurs de recherche, des réacteurs russes ou ceux de la filière CANDU. C’est ainsi que la Corée du Nord, refusant de se plier à toute règle, a réussi en 2005 à fabriquer à partir d’un petit réacteur le plutonium de sa première bombe atomique.

Hormis ce cas extrême, les réacteurs civils sont contrôlés par l’Agence Internationale de l’Energie Atomique dans les pays signataires du traité de non-prolifération (y compris l’Iran). Le retraitement en France des combustibles usés à l’Usine de la Hague, l’extraction du plutonium avec la fabrication des combustibles MOX, sont également sous le contrôle de cette même agence.

La radiotoxicité du combustible usé
L’évolution au cours du temps de la radiotoxicité d’un assemblage de combustible usé montre que la part du plutonium devient prépondérante au bout de 30 ou 40 ans et pour des temps très longs. Si ce plutonium n’est pas séparé par un retraitement, cette radiotoxicité dominera celle des déchets qu’il faudra stocker. Cette toxicité qui dure, l’importante chaleur dégagée explique en plus de sa valeur énergétique pourquoi la France a choisi d’extraire le plutonium des combustibles usés.
© CEA

Un déchet radiotoxique et longtemps calorifique

Le plutonium présent dans les combustibles usés est environ 10 fois plus abondant que les actinides mineurs. Les craintes entourant le stockage du plutonium et des actinides proviennent de ce que ces noyaux lourds sont à la fois des poisons chimiques et radioactifs. La radioactivité du plutonium provient surtout d’isotopes dont la période radioactive est plus courte que celle de l’isotope 239 fissile (24110 ans).

Les isotopes du plutonium, émetteurs de particules alpha (sauf le plutonium-241), sont très radiotoxiques en cas d’ingestion. L’ingestion se fait par voies respiratoires plutôt que digestives. La fixation se fait avec une période biologique d’environ 20 ans au niveau du foie, 50 ans au niveau des os. Il faut rappeler cependant que le plutonium est très peu mobile. Conditionné généralement sous forme d’oxyde insoluble (PuO2), il pénètre difficilement dans la sphère du vivant.

Si le combustible usé doit être stocké comme déchet ultime avec son plutonium, ce stockage nécessiterait des installations beaucoup plus importantes et étendues que celui des colis vitrifiés envisagé en France.Dans ces installations, plus la chaleur dégagée par les désintégrations radioactives est importante, plus il est nécessaire d’espacer les colis.

Les désintégrations alpha du plutonium sont environ dix fois plus calorifiques que les désintégrations bêta des produits de fission. Alors que le dégagement de chaleur des produits de fission, fort au départ à cause du césium et du strontium, disparait pratiquement en 300 ans, celui du plutonium-239 prédominant n’aura diminué que de moitié en 24 000 ans. Considérés comme déchets, les combustibles usés dégageront beaucoup plus de chaleur, plus longtemps et demanderont plus d’espacement que les colis de déchets vitrifiés.

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